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Commerce au point mort à al-Qaim, un poste-frontière bénéfique aux milices pro-iraniennes

Hassan al-Obaidi à Bagdad

Des membres des forces de sécurité syriennes montent la garde sur un véhicule militaire au poste-frontière récemment rouvert entre Albou Kamal en Syrie et al-Qaim en Irak sur cette photo prise du côté syrien dans la région orientale de Deir Ezzor, le 30 septembre. Derrière eux, les drapeaux syrien (à gauche) et irakien. [AFP]

Des membres des forces de sécurité syriennes montent la garde sur un véhicule militaire au poste-frontière récemment rouvert entre Albou Kamal en Syrie et al-Qaim en Irak sur cette photo prise du côté syrien dans la région orientale de Deir Ezzor, le 30 septembre. Derrière eux, les drapeaux syrien (à gauche) et irakien. [AFP]

Un mois après la réouverture du poste-frontière d'al-Qaim entre l'Irak et la Syrie, l'activité commerciale n'a pas encore repris, selon les responsables de la province de l'Anbar et les gardes-frontières.

Ils expliquent que les milices armées épaulées par l'Iran qui luttent aux côtés du régime du président syrien Bachar el-Assad utilisent ce point de franchissement, entravant toute activité commerciale et économique potentielle.

Avant la réouverture de la frontière terrestre, les miliciens voyageaient en avion, mais les sanctions imposées à l'Iran ont contraint le régime iranien à réduire leurs salaires et les frais de voyage associés.

Une réouverture pleine de promesse

« L'État islamique en Irak et en Syrie » (EIIS) s'était emparé de ce poste-frontière qui relie Bagdad à Damas en 2014 lorsque le groupe terroriste avait mis la main sur de vastes régions du nord-ouest de l'Irak.

Les forces de sécurité irakiennes appuyées par la coalition internationale avaient libéré le poste-frontière d'al-Qaim fin 2017, et l'ont officiellement rouvert le 30 septembre 2019.

Lors de la cérémonie de réouverture, le directeur de l'Autorité irakienne des douanes Kazim al-Aqabi a déclaré que ce point de passage avait joué un rôle important pour le commerce et le renouveau économique de la région.

Cette réouverture contribuera à créer des emplois pour la population locale d'al-Qaim en Irak et d'Abou Kamal en Syrie, a-t-il ajouté.

Toutefois à ce jour, il y a eu peu d'activité commerciale ou de tourisme et de déplacements de particuliers ou de familles, a expliqué à Diyaruna un responsable des douanes au poste-frontière d'al-Qaim qui a demandé à conserver l'anonymat.

Les seules personnes à utiliser ce point de passage sont les miliciens appuyés par l'Iran qui combattent en Syrie, a-t-il poursuivi.

Ces individus sont membres de plusieurs milices, dont les plus importantes sont Harakat al-Nujaba, Sayyed al-Shuhada, Kataib Hezbollah et Ansar Allah al-Awfiya, qui se déplacent en véhicules 4x4 ou en bus, a précisé ce responsable des douanes.

Le régime syrien semble faciliter directement leur entrée en Syrie, a-t-il ajouté.

Bénéfique pour les milices pro-iraniennes

La réouverture de la frontière bénéficie aux milices qui soutiennent le régime syrien, ce qui n'a aucune valeur économique ou commerciale, a expliqué Mohammed al-Hayani, spécialiste irakien de la sécurité.

Au contraire, elle menace la sécurité et la stabilité de l'Irak, a-t-il continué.

Lorsque l'EIIS contrôlait la région frontalière, il faisait passer des marchandises interdites, des armes et des munitions, entre al-Qaim côté irakien et Abou Kamal et al-Tanf côté syrien, a-t-il indiqué.

Maintenant que la frontière a rouvert, les militants recrutés par l'Iran pour aller combattre aux côtés du régime syrien peuvent facilement se déplacer, déguisés en civils ou en touristes, a-t-il expliqué.

La Syrie n'a aucun produit agricole ou industriel à exporter en Irak, a expliqué al-Hayani à Diyaruna. De plus, les importations en provenance de Turquie et de Jordanie sont moins chères, de meilleure qualité, et plus faciles à obtenir pour les entreprises privées et le secteur public d'un point de vue sécuritaire et financier.

Le tourisme est également inexistant entre l'Irak et la Syrie, et lorsqu'il reprendra, les gens ne choisiront vraisemblablement pas cet itinéraire pour des raisons de sécurité et pour le temps qu'il faut pour traverser, a-t-il poursuivi.

Pour toutes ces raisons, le poste-frontière d'al-Qaim est vu comme un point de franchissement au service des milices pro-iraniennes et dont l'Iran a soutenu la réouverture, a indiqué al-Hayani.

« Les activistes du Hezbollah libanais peuvent également l'utiliser pour se déplacer sans être repérés ni surveillés lorsqu'ils sécurisent leurs routes d'approvisionnement avec l'Iran », a-t-il ajouté.

Surveiller la frontière

Après la réouverture du poste-frontière d'al-Qaim, les échanges n'ont pas repris comme escompté, a déploré le député irakien Salam al-Shammari.

« Tout le monde est bien conscient de la situation sécuritaire en Syrie, et de ce fait aucune activité commerciale n'a repris », a-t-il indiqué à Diyaruna.

« Avant 2014, nous remplissions deux véhicules de passagers [civils] tous les jours », s'est rappelé le directeur de l'agence Voyages et Tourisme al-Banafsaj, Khaldoun al-Qaisi.

« Mais depuis la reprise du passage terrestres vers Damas, seuls neuf passagers ont réservé leur voyage, ce qui ne paie même pas l'essence pour leur faire passer la frontière », a-t-il précisé à Diyaruna.

Le poste-frontière d'al-Qaim sert maintenant plus aux activistes qu'aux civils, a déclaré Ali al-Mahlawi, un ancien membre des Sahwa, une milice tribale irakienne fondée en 2006 pour lutter contre al-Qaïda.

L'Irak utilise à nouveau les combattants de Sahwa pour assurer la sécurité dans diverses régions du pays.

L'armée de l'air irakienne et la coalition internationale surveillent l'entrée clandestine d'activistes pro-iraniens en Syrie, ce qui enfreindrait le droit international et les résolutions des Nations unies concernant la situation en Syrie et y alimentent le conflit, a conclu al-Mahlawi pour Diyaruna.

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