NOUVELLES D’IRAK
Réfugiés

La progression du régime dans Alep provoque la fuite de 900 000 Syriens

Waleed Abou al-Khair au Caire et l'AFP

Des femmes syriennes accompagnent des enfants dans un champ boueux à l'intérieur du camp de déplacés internes de Washukanni Camp, près de la ville d'al-Hasakeh à majorité kurde dans le nord-ouest de la Syrie, le 17 février 2020. [Delil Souleiman/AFP]

Des femmes syriennes accompagnent des enfants dans un champ boueux à l'intérieur du camp de déplacés internes de Washukanni Camp, près de la ville d'al-Hasakeh à majorité kurde dans le nord-ouest de la Syrie, le 17 février 2020. [Delil Souleiman/AFP]

Les forces du régime syrien poursuivent leur offensive visant à nettoyer le dernier bastion de l'opposition dans le nord de la Syrie, alors même que les organisations humanitaires et les activistes locaux avertissent des conséquences « horribles » pour les civils de la région.

« La bataille pour la libération des provinces d'Alep et d'Idlib se poursuit, quel que soit l'air chaud qui souffle du nord », a déclaré lundi 17 février le président Bashar al-Assad dans un discours retransmis à la télévision d'État, en référence aux mises en garde de la Turquie.

Mais cette offensive a des conséquences dramatiques sur des centaines de milliers de civils qui sont déplacés ou dont les bébés meurent de froid parce que les camps de déplacés internes (DI) sont saturés.

Selon les Nations unies, l'offensive du régime épaulé par la Russie dans le nord-ouest de la Syrie a déplacé 900 000 personnes depuis le début du mois de décembre.

Des soldats de l'armée syrienne progressent sur une route dans la campagne au nord d'Alep, le 17 février 2020. [AFP]

Des soldats de l'armée syrienne progressent sur une route dans la campagne au nord d'Alep, le 17 février 2020. [AFP]

Des volutes de fumée s'élèvent après des frappes aériennes russes sur des zones civiles de la campagne à l'ouest d'Alep. [Photo fournie par la défense civile syrienne]

Des volutes de fumée s'élèvent après des frappes aériennes russes sur des zones civiles de la campagne à l'ouest d'Alep. [Photo fournie par la défense civile syrienne]

« La crise dans le nord-ouest de la Syrie a atteint un nouveau niveau dans l'horreur », a déclaré Mark Lowcock, le directeur des affaires humanitaires et du secours d'urgence des Nations unies.

Les personnes déplacées sont dans leur immense majorité des femmes et des enfants qui sont « traumatisés et contraints de dormir dehors dans des températures glaciales, parce que les camps sont saturés », a-t-il précisé lundi. « Les mères brûlent du plastique pour garder leurs bébés au chaud. Les bébés et les nourrissons meurent à cause du froid. »

« La seule option est un cessez-le-feu », a ajouté Lowcock.

Les dernières violences de ce mardi ont causé la mort d'au moins deux civils, l'un lors d'une frappe aérienne russe, l'autre dans un bombardement du régime.

Un membre du Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) iranien, allié d'al-Assad, a été tué par une frappe de roquette, a indiqué l'agence de presse Fars.

Appel en faveur de couloirs humanitaires

« Durant ces seuls quatre derniers jours, quelque 43 000 nouveaux déplacés ont fui l'ouest d'Alep où les combats ont été particulièrement violents », a expliqué le porte-parole des Nations unies David Swanson mardi à l'AFP.

Depuis le début du mois de février, le nombre des déplacés atteint un record de 300 000 personnes.

L'Office des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires a indiqué que la semaine dernière dans certaines régions, la température était tombée à moins 7 degrés Celsius.

« Les familles qui avaient pu emporter certaines de leurs affaires lors de leur fuite brûlent tout ce qu'elles peuvent, y compris des meubles et tout ce qui peut être utilisé pour rester au chaud ne serait-ce que quelques heures », a-t-il expliqué.

La Haute Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme Michelle Bachelet a appelé à la mise en place de couloirs humanitaires pour les civils en fuite, pour empêcher de nouveaux décès.

« Alors que se poursuit l'offensive du gouvernement et que les gens se retrouvent bloqués dans des poches de plus en plus étroites, je crains qu'un nombre encore plus important de personnes ne soient tuées », a-t-elle déclaré dans un communiqué.

Vague massive de DI

La région d'Idlib, et certaines parties de la province voisine d'Alep, abritent quelque trois millions de personnes, dont la moitié avaient déjà été déplacées d'autres parties du pays.

Ces dernières semaines, les troupes syriennes et leurs alliés épaulés par la Russie ont accentué leur offensive contre l'opposition et les groupes terroristes dans la région.

Elles ont déjà repris de larges portions d'Idlib ainsi que des zones clés qui ont permis de sécuriser l'autoroute vitale M5, qui relie Damas à Alep en passant par les villes de Homs et Hama, ainsi que tous les environs de la ville d'Alep, pour la première fois depuis 2012.

« Une vague [de DI] massive a atteint le nord de la Syrie et la zone relativement sûre de la frontière avec la Turquie après la progression de l'armée du régime syrien et de ses milices alliées dans les régions au sud et à l'ouest de la ville d'Alep », où Tahrir al-Sham s'est retiré d'environ 80 localités, villages et postes de contrôle, a expliqué à Diyaruna l'activiste d'Idlib Moussab Assaf.

« La situation des DI est tragique alors qu'ils sont regroupés dans des camps informels » et que les températures continuent de baisser, a-t-il continué.

Des milliers de civils fuient maintenant Alep et ses environs par peur d'être harcelés et arrêtés par les forces du régime et ses milices alliées sous prétexte qu'ils appartiennent à des groupes de l'opposition, a-t-il poursuivi.

La peur de la conscription forcée est un autre facteur, a-t-il ajouté.

Violence aveugle

Le grand nombre de DI montre le peu de respect du régime pour son peuple, a déclaré l'avocat syrien Bashir al-Bassam à Diyaruna.

« Comment le régime peut-il dire qu'il protège les civils lorsque leurs maisons sont bombardées et que des centaines d'entre eux sont tués avec l'aide de la Russie ? », s'est-il interrogé.

« Ce qu'il se passe est un prolongement de l'hégémonie russe aux dépens du peuple syrien », a-t-il ajouté.

Lowcock, directeur des affaires humanitaires des Nations unies, a mis en garde que cette violence frappe « aveuglément ».

« Des dispensaires médicaux, des écoles,des zones résidentielles, des mosquées et des marchés ont été touchés », a-t-il indiqué. « Les écoles sont suspendues, de nombreux dispensaires ont fermé. Il plane un sérieux risque d'apparition de maladies. Les infrastructures de base s'effondrent. »

« Nous recevons maintenant des rapports qui indiquent que les réimplantations de personnes déplacées sont à leur tour frappées, entraînant des morts, des blessés et d'autres déplacements encore », a-t-il indiqué.

Une opération de secours humanitaire massive en cours depuis la frontière turque a été « débordée », a-t-il indiqué. « Le matériel et les installations utilisés par les travailleurs humanitaires ont été endommagés. Les humanitaires eux-mêmes sont déplacés et tués. »

Dimanche 16 février, le président américain Donald Trump a demandé à la Russie de mettre un terme à son soutien aux « atrocités » du régime syrien dans la région d'Idlib, a indiqué la Maison blanche.

Aimez-vous cet article?

0 COMMENTAIRE (S)
Politique Commentaire * INDIQUE CHAMP NÉCESSAIRE 1500 / 1500