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Najaf mécontent des « ingérences étrangères » dans les affaires irakiennes

Faris al-Omran

Des Irakiens manifestent sous le monument de Tahrir dans le centre de Bagdad pour exiger la fin des ingérences étrangères dans les affaires de leur pays et de meilleures conditions de vie. [Diyaruna]

Des Irakiens manifestent sous le monument de Tahrir dans le centre de Bagdad pour exiger la fin des ingérences étrangères dans les affaires de leur pays et de meilleures conditions de vie. [Diyaruna]

Le plus haut dignitaire religieux chiite d'Irak a mis en garde les acteurs étrangers contre une ingérence dans les affaires irakiennes ou l'imposition de leur volonté aux manifestants qui sont descendus le mois dernier dans les rues pour exiger une nation libre et indépendante et la fin de la corruption endémique.

« Personne, aucun groupe, aucun parti ayant des visées particulières, ni aucun acteur régional ou international ne peut ravir la volonté du peuple irakien et lui imposer la sienne », a déclaré le Grand Ayatollah Ali al-Sistani dans son prêche hebdomadaire lu par un représentant dans la ville sainte de Kerbala le 1er novembre.

Ses commentaires faisaient suite à des informations selon lesquelles le commandant de la force al-Qod du Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI-FQ), Qassem Soleimani, s'était rendu à Bagdad deux jours plus tôt pour rencontrer en secret les leaders des milices épaulées par l'Iran.

Selon les analystes, la déclaration d'al-Sistani reprend les voix de plus en plus fortes des Irakiens qui condamnent l'influence de l'Iran et ses ingérences dans leurs affaires, qu'ils tiennent pour responsables de la détérioration de l'état de leur pays.

Des manifestants se rassemblent sur la place Tahrir de Bagdad pour demander un pays libre et souverain. [Diyaruna]

Des manifestants se rassemblent sur la place Tahrir de Bagdad pour demander un pays libre et souverain. [Diyaruna]

Ghaith al-Tamimi, chercheur en pensée islamique et ancien imam au séminaire de Najaf, a expliqué que dans son dernier prêche en date, al-Sistani avait implicitement fait référence à l'intrusion iranienne lorsqu'il avait parlé d'ingérence internationale et régionale, notamment dans la manière de répondre aux manifestations.

« Il est clair que l'Iran est à blâmer car c'est lui qui a le plus influencé la situation en Irak », a-t-il ajouté.

L'Iran est le seul pays à considérer que ces manifestations constituent « une menace extrême », notamment dans la mesure où elles ont clairement démontré le degré de ressentiment parmi les Irakiens à l'égard de telles ingérences, a-t-il ajouté.

Les manifestations inquiètent l'Iran

Le régime iranien est très inquiet de voir les actuelles manifestations gagner en ampleur et en dynamisme et saper son influence en Irak, a expliqué al-Tamimi.

Cela est en particulier le cas alors que les manifestants ont appelé à un Irak libre et indépendant, qui n'obéisse pas aux menaces de groupes puissants liés au CGRI, a-t-il poursuivi.

Les slogans patriotiques comme (Nous voulons une nation) et (Je revendique mes droits), entendus lors de ces manifestations, menacent le plan du CGRI de semer le sectarisme et d'attiser la ferveur religieuse, a-t-il continué.

Le régime iranien n'a pas réussi à s'implanter fortement au sein de la société irakienne, a-t-il poursuivi,soulignant que même les Irakiens des provinces du sud, en qui l'Iran voyait pourtant de proches alliés, ont protesté contre ses ingérences dans leurs affaires qui ne leur ont apporté que désespoir et privations.

Cet échec, a-t-il poursuivi, est encore souligné par l'incapacité de l'Iran à imposer son hégémonie sur les autorités religieuses à Najaf et en Irak.

La république islamique a favorisé la doctrine du Wilayat al-Faqih (la Tutelle du Juriste) à Najaf et dans toute la région, qui appelle à l'allégeance à l'al-Wali al-Faqih -- le guide suprême iranien, Ali Khamenei.

Mais les autorités religieuses de Najaf n'accueillent pas d'un bon œil l'influence idéologique iranienne et rejettent largement cette doctrine, a expliqué al-Tamimi.

Ressentiment public face à l'influence iranienne

La position d'al-Sistani consistant à refuser toute ingérence étrangère est « positive et reflète le ressentiment public face à l'influence iranienne », a expliqué à Diyaruna le politologue Ghazi Faisal Hussein.

Dans son prêche, al-Sistani a apporté son soutien aux demandes de réforme des protestataires, à l'éradication de la corruption, à la distribution équitable des richesses et à la fourniture de services publics, a indiqué Hussein.

Al-Sistani a également souligné que seuls les Irakiens déterminent leur propre destin, a-t-il ajouté, et a appuyé leurs demandes de mettre fin à ces ingérences, en particulier de la part de l'Iran.

Les Irakiens assimilent l'influence iranienne dans leur pays à du « colonialisme » qui vise à donner la main haute au CGRI et à leurs milices, a saper l'état de droit et à alimenter la violence et le sectarisme, a ajouté Hussein.

Les milices épaulées par l'Iran cherchent à détruire l'économie nationale de l'Irak et d'autres pays de la région en les noyant sous les dettes, l'inflation et les difficultés économiques, a-t-il poursuivi, afin de pouvoir être en mesure de contrôler facilement le processus politique dans ces pays et au bout du compte faire main basse sur leurs ressources.

Les Irakiens qui sont descendus manifester dans les rues expriment « leur colère contre le rôle de l'Iran dans la spoliation de leurs ressources nationales et le pouvoir de leurs milices dans leur pays, qui entraînent une corruption généralisée, une détérioration des services publics, des taux de pauvreté élevés, de mauvaises conditions de vie et un chômage élevé ».

« Ces milices pillent notre pétrole au bénéfice de l'économie iranienne », a-t-il ajouté. « Ils retardent les projets industriels et détruisent les ressources agricoles afin que l'Irak n'ait d'autre choix que d'importer tous ses produits agricoles d'Iran. »

« Aujourd'hui, les Irakiens exigent leurs droits et veulent que soit mis un terme à l'ingérence de l'Iran et à l'influence du CGRI et de ses agents », a-t-il conclu.

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O, Dieu, libérez ce peuple de ce malheur.

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