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Les chrétiens de Mossoul encouragés à revenir chez eux

Khalid al-Taie

Des Irakiens réhabitent l'église Saint Korkis dans le district de Bartella de la province de Ninive, le 19 novembre. [Photo extraite de la page Facebook officielle de l'église]

Des Irakiens réhabitent l'église Saint Korkis dans le district de Bartella de la province de Ninive, le 19 novembre. [Photo extraite de la page Facebook officielle de l'église]

Les chrétiens déplacés de Mossoul sont invités à réintégrer leurs foyers dans la ville et à tourner définitivement la page de l'ère de « l'État islamique en Irak et en Syrie » (EIIS).

Bien que plus de trois ans se soient écoulés depuis que l'EIIS a été battu en Irak, les chrétiens tardent à revenir chez eux à Mossoul, une ville qui était autrefois la capitale de facto du groupe en Irak.

Lorsqu'il régnait sur la ville, l'EIIS s'en était pris violemment à la communauté chrétienne de la région, chassant les familles chrétiennes, s'emparant de leurs maisons et de leurs biens, et désacralisant et détruisant plusieurs églises historiques.

Un groupe de volontaires locaux, « Les Bras de Mossoul », ont alors décidé par eux-mêmes de restaurer les relations interconfessionnelles dans la ville en participant à diverses activités pour témoigner de la solidarité sociale et permettre la guérison.

Les chrétiens irakiens assistent à la messe de Noël dans l'église catholique syriaque de Mar Jacob al-Mouqataa dans la ville de Qaraqosh, à une trentaine de kilomètres de Mossoul, dans la province de Ninive, le 24 décembre 2019. [Zaid al-Obeidi/AFP]

Les chrétiens irakiens assistent à la messe de Noël dans l'église catholique syriaque de Mar Jacob al-Mouqataa dans la ville de Qaraqosh, à une trentaine de kilomètres de Mossoul, dans la province de Ninive, le 24 décembre 2019. [Zaid al-Obeidi/AFP]

Mouhammad Issam Bahaaldine, l'un de ses fondateurs, a expliqué que son équipe avait restauré l'église Mar Toma dans le centre de Mossoul, dans le cadre de la campagne « Nos antiquités, notre identité » visant à restaurer sept sites historiques.

Cette campagne a bénéficié du soutien de l'Agence américaine pour le développement international (USAID).

L'équipe de Bahaaldine a nettoyé l'église et réparé l'éclairage, a-t-il expliqué à Diyaruna, qualifiant ce travail de réparation de « message d'amour aux chrétiens déplacés de Mossoul pour les inviter à revenir».

Les volontaires espèrent ainsi rassurer les chrétiens quant au fait que leur ville a retrouvé son identité, « une ville de coexistence qui se languit de leur retour », a-t-il ajouté.

Son équipe envisage d'organiser un événement à l'intérieur de l'église maintenant qu'elle a été restaurée, et invite les familles chrétiennes déplacées et certains notables de la ville pour renforcer la solidarité de la communauté, a expliqué Bahaaldine.

Tracer la voie du retour

Dans une autre initiative, des volontaires ont participé à la restauration de 25 maisons de Mossoul qui avaient été détruites par l'EIIS, dans le but d'encourager leurs propriétaires à rentrer, a ajouté Bahaaldine.

Ils continuent d'aider les familles qui reviennent, qu'elles soient chrétiennes ou membres d'autres groupes religieux, en leur fournissant des paniers alimentaires et d'autres articles de première nécessité et en nettoyant leurs quartiers, a-t-il poursuivi.

Ce groupe de volontaires travaille également sur d'autres projets, notamment de fourniture de vêtements et d'autres formes d'aide aux orphelins dont les parents ont été tués durant la guerre pour chasser l'EIIS, et pour fournir du travail à ceux qui n'en ont pas.

Le député irakien Yonadam Kanna, président du groupe parlementaire Chrétien Rafidain, a expliqué à Diyaruna que durant ses quelque 4 000 ans d'Histoire, Mossoul a abrité des fidèles de nombreuses religions et de nombreux groupes ethniques.

« Mais aujourd'hui, elle a été vidée de cette diversité qui faisait sa réputation depuis si longtemps », a-t-il expliqué.

Avant le règne de l'EIIS, 50 000 chrétiens vivaient à Mossoul, a-t-il rappelé, soulignant que seule une centaine d'entre eux sont revenus depuis la défaite du groupe.

Cela est en grande partie dû à « l'impact psychologique négatif que les terroristes ont laissé dans les esprits de la population chrétienne et du sentiment d'insécurité, même après la fin du contrôle par le groupe », a indiqué Kanna.

Il a souligné l'importance de la réconciliation sociétale et la nécessité de promouvoir un environnement stable qui garantisse leurs droits aux habitants, quelle que soit leur origine.

Le gouvernement doit protéger la présence historique des chrétiens dans la région des Plaines de Ninive et lutter contre toute tentative d'induire des changements démographiques dans cette région, a-t-il ajouté.

« Les gens devraient rentrer chez eux »

Ces dernières années, les chrétiens des régions d'Alqosh, de Qaraqosh, Baashiqa, Bahzani, Bartella, Carmelos, Batnaya, Tal Saqf et Tal Keyf ont commencé à rentrer dans leurs villes, a expliqué Kanna.

Mais leur nombre reste limité à cause de l'absence de services publics et de la rareté des emplois, a-t-il ajouté, soulignant que beaucoup se sont adaptés à la vie à Bagdad, Erbil et Dohouk, où nombre d'entre eux s'étaient installés.

Pour faciliter leur retour, a-t-il poursuivi, des indemnités financières devraient être versées aux chrétiens qui ont perdu leur maison et dont les moyens de subsistance ont été affectés par l'EIIS.

George Shimoun Kaku, président de l'association caritative des Plaines de Ninive dans le district de Bartella, a expliqué que l'environnement est propice au retour des chrétiens, et les a encouragés à mettre un terme à leur déplacement prolongé.

Kaku, un homme d'affaires qui dirige plusieurs sociétés industrielles basées dans Ninive, a indiqué à Diyaruna qu'il avait été parmi les premiers à revenir dans sa maison dans les Plaines de Ninive.

Ses entreprises contribuent aujourd'hui à la reconstruction locale et à la remise en état du secteur des services, a-t-il ajouté, notant que « je n'aurais pas choisi de revenir et de reprendre le travail si la situation n'avait pas été normale et stable ».

« L'EIIS est désormais une chose du passé, et cela fait longtemps que les craintes pour la sécurité se sont dissipées », a-t-il conclu, ajoutant que les gens « ne devraient pas y réfléchir à deux fois avant de rentrer ».

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