Des opérations préventives contre des poches d'éléments restants de « l'État islamique en Irak et en Syrie » (EIIS) dans les régions reculées d'Irak, une présence militaire accrue et d'excellents renseignements locaux ont aidé à dissuader les tentatives d'enlèvement, ont expliqué les responsables irakiens.
Alors qu'il était battu en Irak et que ses sources de revenus fondaient comme neige au soleil, l'EIIS s'en était de plus en plus remis aux enlèvements pour extorquer l'argent des rançons et renflouer ses coffres.
Mais face au renforcement des mesures de sécurité, ces enlèvements se produisent désormais à une échelle bien plus limitée, ont indiqué des responsables de la sécurité à Diyaruna.
Dans la province occidentale de l'Anbar, par exemple, seuls « un ou deux » cas d'enlèvements par l'EIIS ont été enregistrés ces derniers mois, a précisé Karim al-Karbouli, membre du conseil provincial de l'Anbar
Bien que cette question ne soit plus un sujet de préoccupation majeur, a-t-il ajouté, « nous restons vigilants face aux activités terroristes, quelle qu'en soit la nature ou l'importance ».
« La question des enlèvements classés comme activité terroriste est toujours à l'ordre du jour pour les autorités locales responsables de la sécurité », a-t-il tenu à souligner.
Motivés par l'argent
La motivation première de ces crimes est l'argent, a expliqué al-Karbouli, précisant que même de relativement faibles sommes peuvent donner au groupe la capacité de déstabiliser la situation sécuritaire et menacer la paix.
« Les forces de sécurité mettent en œuvre tous leurs moyens militaires pour protéger et sécuriser les routes lointaines », a-t-il poursuivi, soulignant que celles-ci traversent souvent des terrains accidentés et désertiques.
« La pression sécuritaire exercée sur les activistes au plus profond du désert ne leur laisse aucun espace pour lancer leurs attaques, notamment leurs opérations d'enlèvements », a-t-il expliqué.
La fin de l'année 2017 avait connu une vague de rapts de civils par l'EIIS, dont la plupart avaient eu lieu dans des zones désertiques isolées.
Certaines victimes avaient pu être libérées après que leurs familles eurent versé des dizaines de milliers de dollars à leurs ravisseurs, par des méthodes occultes ou des transferts bancaires traditionnels.
Pour dissuader ce type de crime, la Banque centrale d'Irak avait annoncé fin août qu'elle avait mis en place en coopération avec les agences gouvernementales une commission spéciale chargée de lutter contre le financement du terrorisme.
« Pas de sirène d'alarme »
Aujourd'hui, l'EIIS monte des opérations d'enlèvement à une fréquence bien moindre que par le passé, a expliqué Binyan al-Jarba, membre de la commission pour la sécurité du conseil provincial de Ninive.
« Ces incidents se font plus rares et sont de moindre ampleur, et donc cela ne tire aucune sirène d'alarme », a-t-il déclaré à Diyaruna.
La quantité d'argent que l'EIIS est en mesure de collecter en exigeant le paiement de rançons est « négligeable », a-t-il précisé, soulignant que le soutien qu'apportent les gens aux forces de sécurité et les renseignements fournis par les habitants locaux sont autant de facteurs essentiels de cette baisse du nombre d'enlèvements.
Un autre facteur est le nombre d'opérations préventives « visant les activistes dans toutes les régions, que ce soit dans le désert, dans les montagnes, les vallées ou même dans les cellules dormantes qui se cachent au beau milieu des civils », a-t-il ajouté.
Les forces de sécurité sont aujourd'hui professionnelles et ont reçu une formation de haut niveau qui les aide à identifier le lieu où sont détenues les personnes enlevées, afin de pouvoir les soustraire aux mains de leurs ravisseurs, a-t-il rapporté.
La sécurité peut encore être améliorée en renforçant les rangs de la police locale dans la province de Ninive, a poursuivi al-Jarba.
Cibler le crime organisé
Les enlèvements « peuvent se classer dans la catégorie du crime organisé », a expliqué à Diyaruna l'expert en stratégie Ahmed al-Sharifi.
« Bien que ces incidents aient récemment connu un fort déclin, leur existence même indique que les terroristes cherchent de nouvelles ressources pour remplacer celles qu'ils ont perdues », a-t-il poursuivi.
Auparavant, les sources de financement de l'EIIS provenaient des revenus astronomiques du pillage et de la contrebande des ressources pétrolières et nationales, ainsi que du commerce transfrontalier, a-t-il indiqué.
Un autre objectif derrière ces enlèvements est de « terroriser les gens et d'embarrasser et de démoraliser les forces de sécurité », a ajouté al-Sharifi.
« L'éradication du crime organisé demande plus que le recours à la force militaire », a-t-il conclu ; cela nécessite des efforts sécuritaires de haut niveau fondés sur les renseignements, les opérations de surveillance et une technologie sophistiquée permettant d'identifier les sources de la menace.