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« Des bombes à retardement » : les risques qui pèsent sur les enfants d’al-Hol

Waleed Abou al-Khair au Caire

Humanitaires et sociologues craignent que les enfants du camp d’al-Hol ne soient exploités par les femmes extrémistes et finissent par constituer une nouvelle génération de membres de l’EIIS. [Photo via la page Facebook de Naher Media]

Humanitaires et sociologues craignent que les enfants du camp d’al-Hol ne soient exploités par les femmes extrémistes et finissent par constituer une nouvelle génération de membres de l’EIIS. [Photo via la page Facebook de Naher Media]

Les enfants qui habitent dans le camp d’al-Hol en Syrie sont des « bombes à retardement » qui risquent d’être radicalisés car ils sont élevés selon des idées extrémistes et dans des conditions difficiles, mettent en garde les différents acteurs humanitaires.

De nombreuses femmes qui appartenaient à « l’État islamique en Irak et en Syrie » (EIIS) vivent dans ce camp et continuent d’inculquer à leurs enfants et à d’autres l’idéologie radicale du groupe, indiquent-ils.

« Près de 34 000 enfants âgés de moins de 12 ans vivent à al-Hol, dont plus de 120 ne sont pas accompagnés ou ont été séparés de leur famille et vivent dans un centre d’hébergement provisoire installé dans le camp », a déclaré le porte-parole des Nations unies Stéphane Dujarric lors d’un point de presse le 16 octobre.

Les conditions de vie à al-Hol sont « en tous points difficiles », a-t-il indiqué, ajoutant que le mois dernier, « les humanitaires ont tiré la sonnette d’alarme face à la dégradation de la situation sécuritaire dans le camp, après une hausse des incidents violents ».

Des enfants jouent devant des tentes dans le camp d’al-Hol, dans le nord de la Syrie. [Photo via la page Facebook de Naher Media]

Des enfants jouent devant des tentes dans le camp d’al-Hol, dans le nord de la Syrie. [Photo via la page Facebook de Naher Media]

Les difficultés auxquelles sont confrontés les enfants du camp d’al-Hol sont quelques-uns des problèmes les plus graves que doivent traiter les personnels sociaux et humanitaires dans le camp, a expliqué Nermin Othman, qui travaille au département humanitaire du Croissant-Rouge kurde dans le camp d’al-Hol.

Ces enfants appartiennent à trois groupes différents : le premier se compose d’enfants qui vivent avec leurs familles et sont les enfants d’éléments de l’EIIS, de collaborateurs du groupe ou de familles enfermées dans le camp.

Le deuxième groupe est celui des enfants orphelins de père, dont les pères étaient des combattants de l’EIIS morts ou en fuite, qui vivent dans le camp avec leur mère, et le troisième se compose d’orphelins retrouvés dans les zones libérées du contrôle de l’EIIS.

Les organisations qui travaillent dans le camp font de leur mieux pour créer un environnement adapté à ces enfants, a expliqué Othman à Diyaruna. « Mais le manque de contributions et les ressources limitées sont autant d’obstacles pour apporter des services adéquats à ces très nombreux [enfants] », a-t-il poursuivi.

Il n’y a pas assez d’écoles pour tous ni assez d’espace pour les accueillir tous lors des activités qui sont organisées chaque jour dans le camp.

Des jeunes esprits malléables

Les enfants du camp d’al-Hol sont « des bombes à retardement élevées par les femmes [de l’EIIS] dans le camp », a déclaré Basma Husni, professeur de sociologie à l’Université du Caire.

« Jusqu’à l’âge de 18 ans, les enfants doivent être scolarisés et bénéficier d’un environnement social normal, sans lequel il sera très difficile de les faire revenir à une vie normale lorsqu’ils grandiront », a-t-elle expliqué à Diyaruna.

Cette question doit faire l’objet d’une grande attention au plan international car ces enfants sont originaires de nombreux pays, a-t-elle poursuivi, et les réinsérer dans la société « sera un processus difficile qui nécessitera des financements importants ».

« C’est un point qu’un pays ou l’administration du camp d’al-Hol ne peut absolument pas régler seul », a ajouté Husni.

Près de 40 000 enfants issus de plus de 60 pays vivent dans le camp d’al-Hol, selon l’UNICEF.

Husni a recommandé de renvoyer certains de ces enfants dans leurs pays d’origine pour y entreprendre une déradicalisation et une rééducation sous la supervision d’organisations internationales, car il est essentiel de sortir ces enfants de l’environnement très dur de ce camp.

« Durant les premiers stades de la vie, les esprits des enfants absorbent les idées qui leur sont inculquées, et rester sous le contrôle de femmes extrémistes, quand bien même ce seraient leurs mères, les mènera irrémédiablement à l’extrémisme et à épouser des idées déviantes », a-t-elle ajouté.

Les forces kurdes qui administrent ce camp ont à plusieurs reprises demandé que les pays d’origine rapatrient les combattants étrangers et leurs familles.

Mais de nombreux pays ont été lents à répondre, autrement qu’en rapatriant quelques orphelins.

Lundi 26 octobre, quatre enfants albanais ont été rapatriés depuis al-Hol à la demande du gouvernement albanais.

Le journaliste et activiste social Ammar Saleh a déclaré qu’en couvrant le camp d’al-Hol et en travaillant avec une organisation humanitaire et sociale, il avait pu voir sur le terrain les agissements des femmes de l’EIIS.

« Elles empêchent leurs enfants et les enfants de beaucoup [d’autres] femmes de participer aux activités de loisir, sociales et éducatives qui sont organisées dans le camp afin de garder les enfants sous [leur] contrôle », a-t-il expliqué à Diyaruna.

À la place, elles implantent les idées dures de l’EIIS dans les esprits de ces enfants, car elles sont nombreuses à croire encore dans ces idées, afin de former une nouvelle génération radicalisée de jeunes de l’EIIS, a-t-il poursuivi.

Ces femmes terrifient souvent les autres et agissent violemment afin de pouvoir contrôler leurs enfants, a conclu Saleh.

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