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Les divisions apparaissent entre le CGRI et les milices irakiennes

Faris al-Omran

Des membres de la Kataib Hezbollah dans les faubourgs de la ville syrienne d’al-Boukamal en novembre 2017. [Photo diffusée sur Internet]

Des membres de la Kataib Hezbollah dans les faubourgs de la ville syrienne d’al-Boukamal en novembre 2017. [Photo diffusée sur Internet]

Les divisions au sein des factions armées parrainées par le « Corps des Gardiens de la révolution islamique » (CGRI) iranien sont de plus en plus manifestes dans l’est de la Syrie alors que le renforcement des sanctions américaines conduit à une réduction des dépenses du CGRI pour les opérations étrangères, ont expliqué des spécialistes à Diyaruna.

Les premières frictions sont apparues entre la milice irakienne de la Kataeb Hezbollah et les commandants du CGRI ainsi que d’autres groupes d’intermédiaires qui luttent pour le pouvoir et leur influence dans la région, ont-ils ajouté.

Les observateurs ont attribué ces divisions à la féroce concurrence pour le leadership et les sources de richesses entre les parties dominantes sur le terrain.

Les milices irakiennes sont pour l’essentiel concentrées dans l’est de la Syrie, où opèrent une vingtaine de milices. Outre la Kataib Hezbollah, les milices les plus puissantes sont al-Nujaba, la brigade Zulfiqar, et les brigades Haidariyoun et Sayed al-Shuhada.

Des milices iraniennes, afghanes (Fatemiyoun), pakistanaises (Zainabiyoun) et libanaises luttent également pour leur influence.

« Chaque camp cherche à dominer l’autre »

Les milices appuyées par le CGRI, y compris celles qui sont composées de ressortissants irakiens, accusent la Kataeb Hezbollah de les marginaliser avec arrogance et d’adopter des décisions unilatérales.

« Ces différends sont apparus plus forts que jamais alors que chaque parti tente de dominer l'autre et d’imposer son influence et sa domination sur les processus de décision », a expliqué Cheikh Moudar al-Asad, un membre du Conseil tribal syrien.

« Il existe aujourd’hui de profondes divisions et des conflits internes entre les entités loyales à l’Iran qui luttent pour le leadership, l’acquisition de terres et des ressources naturelles dans l’est de la Syrie, essentiellement le pétrole et le gaz », a-t-il poursuivi pour Diyaruna.

« La diminution progressive des fonds versés aux intermédiaires de l’Iran du fait de l’impact des sanctions économiques contre les régimes iranien et syrien » a conduit à l’émergence de divisions en surface, a ajouté al-Asad.

Les tensions sont fortes entre la direction du CGRI en Syrie et ses milices alliées, en particulier la Kataeb Hezbollah, qui ont vu les salaires mensuels de chacun de leurs combattants passer de 1500 dollars à moins de 300 dollars.

De plus, le bombardement constant des positions des intermédiaires de l’Iran dans la vallée de l’Euphrate a contribué à ce regain de tensions et de frustrations, a-t-il ajouté.

La situation dans les zones où les milices pro-iraniennes sont influentes s’est considérablement détériorée, a poursuivi al-Asad.

« Les habitants des villes et des localités de l’est de la Syrie comme al-Mayadeen, al-Kasra, Deir Ezzor, al-Shamiya, al-Boukamal, al-Maraiah et al-Tabani ont grandement souffert des violations commises par ces groupes », a-t-il continué.

Ils ont saisi leurs maisons et leurs terres et volé leurs récoltes, a-t-il ajouté. De nombreux habitants ont donc été contraints de quitter la zone en raison des pénuries alimentaires, des taxes imposées par ces milices et de la stagnation économique.

La détresse financière aggrave les divisions

« La Kataeb Hezbollah est l’un des pires agents du CGRI, que ce soit en Irak ou en Syrie », a expliqué le politologue syrien Ziyad Al-Munjid.

Les différends qui sont apparus entre eux n’ont pas encore affecté la nature stratégique de leur relation, mais elles tournent souvent autour des « questions tactiques ou personnelles », a-t-il indiqué à Diyaruna.

Toutefois, la détresse financière continue que vivent ces milices devrait « creuser un peu plus ces divisions entre elles et fragiliser un peu plus le front interne, car il est notoirement connu que l’Iran finançait généreusement ces groupes depuis des années », a-t-il poursuivi.

Désormais, la situation est différente, et les combattants qui avaient rejoint ces groupes, notamment des Syriens pauvres, se plaignent maintenant de leurs bas salaires, car nombre d’entre eux les avaient rejoints pour des raisons financières plus qu’idéologiques.

« Les groupes pro-iraniens feront désormais tout pour protéger leurs intérêts économiques », a-t-il expliqué. « Ils ont drainé les richesses de la population locale depuis qu’ils avaient imposé leur contrôle sur les régions de l’est de la Syrie. »

« Ils ont également mis en œuvre un changement démographique dans ces régions en acquérant des biens pour loger leurs combattants et leurs familles, dans le but ultime de servir les intérêts de l’Iran. »

Difficile d’emboîter le pas à Soleimani

Le politologue irakien Ghanem al-Abed a expliqué pour sa part que « les tensions qui prévalent entre les intermédiaires de l’Iran en Syrie ne reflètent rien d’autre que la rivalité entre elles en Irak depuis la mort du général iranien Qassem Soleimani en janvier ».

« Esmail Qaani, qui a remplacé Soleimani, est encore incapable de combler le vide laissé par son prédécesseur et ne parvient pas à rétablir la situation », a-t-il expliqué à Diyaruna.

La lutte pour le pouvoir s’accélère jour après jour, a-t-il indiqué, ajoutant que certaines factions ont « commencé à mener des actions unilatérales sans consulter la direction du CGRI ».

Cela fait un certain temps que l’Iran tente de resserrer son emprise sur les régions frontalières entre l’Irak et la Syrie et d’y renforcer sa présence stratégique, a expliqué al-Abed.

« Ces derniers mois, l’Iran a installé trois nouveaux camps pour ses groupes intermédiaires dans la région frontalière », a-t-il conclu, ajoutant que cela devrait augmenter la contrebande par les points de passages informels et l’aider à récupérer une partie des pertes encourues par suite des sanctions.

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