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Terrorisme

La communauté shabak d’Irak veut que soit reconnue la responsabilité des extrémistes

Khalid al-Taie

Des Irakiens se rassemblent près du site d’une explosion dans le village d’al-Mowafaqiya, dans les Plaines de Ninive, le 6 juin 2014. Ce village est pour l'essentiel peuplé par des membres de la minorité shabak. [Photo extraite de la page Facebook de « Manarat Shabak »]

Des Irakiens se rassemblent près du site d’une explosion dans le village d’al-Mowafaqiya, dans les Plaines de Ninive, le 6 juin 2014. Ce village est pour l'essentiel peuplé par des membres de la minorité shabak. [Photo extraite de la page Facebook de « Manarat Shabak »]

Des membres de la minorité shabak des Plaines de Ninive rassemblent des preuves des violences commises contre leur communauté par les extrémistes, pour s’assurer que les responsables devront en répondre.

Comme d’autres minorités en Irak, les Shabaks ont été la cible de « l’État islamique en Irak et en Syrie » (EIIS) lorsqu'il s’était emparé de vastes régions de l’Irak en 2014, faisant des centaines de victimes.

Et avant même l’émergence de l’EIIS, les Shabaks avaient souffert pendant plusieurs années d’attaques meurtrières contre leurs villages.

Les plus violentes avaient eu lieu en septembre 2009, lorsque deux voitures piégées avaient explosé dans le village de Khazna, détruisant au moins 70 maisons et tuant plus de 50 Shabaks.

Des camions transportent les bagages de familles shabak qui reviennent dans leurs villages dans la région des Plaines de Ninive, le 15 août 2017. [Photo extraite de la page Facebook de « This Is Ninawa Plains »]

Des camions transportent les bagages de familles shabak qui reviennent dans leurs villages dans la région des Plaines de Ninive, le 15 août 2017. [Photo extraite de la page Facebook de « This Is Ninawa Plains »]

Cette attaque s’inscrivait dans le cadre d’une « campagne terroriste systématique » contre la communauté shabak qui avait concerné l’Irak à l’époque, a rappelé à Diyaruna le député irakien Qousay Abbas, vice-président de la commission des droits de l’homme.

Des éléments d’al-Qaïda, et par la suite de l’EIIS, avaient tué et blessé des milliers de Shabaks lors d’attaques armées et suicidaires qui avaient visé les villages des Plaines de Ninive où les Shabaks sont majoritaires, notamment al-Mowafaqiya et Babyakhout, a-t-il ajouté.

Lorsque l’EIIS s’empara des Plaines de Ninive, les habitants de plus de vingt villages shabak s’enfuirent après que leurs maisons furent détruites et incendiées par les militants, a-t-il ajouté.

Abbas, membre de la communauté shabak, a expliqué que les Shabaks avaient réuni des « dossiers détaillés » sur les crimes commis par les extrémistes contre le groupe, notamment les noms de 233 individus enlevés par l’EIIS et dont le sort reste encore inconnu.

La communauté shabak s’est efforcée de rassembler ces preuves pour étayer les enquêtes qui permettront de conduire à « poursuivre et condamner les terroristes pour les crimes haineux qu’ils ont commis », a-t-il indiqué.

« Nous continuons d’appeler le gouvernement à se pencher sur le sort des familles affectées par le terrorisme et à leur fournir une juste indemnisation », a-t-il ajouté.

« Une situation sécuritaire précaire »

Le député Salim Jumaa, membre de la communauté shabak, a demandé une enquête sur le nombre de Shabaks tués par al-Qaïda et l’EIIS, qu’il estime à environ 2 300.

Il a également souhaité que soit faite la lumière sur le sort des jeunes Shabaks enlevés par l’EIIS et toujours portés disparus à ce jour.

Les militants de l’EIIS ont détruit à la bombe des centaines de maisons de Shabaks à Mossoul et dans les Plaines de Ninive et se sont emparés de leurs biens, a-t-il ajouté à Diyaruna. Ils ont également détruit des sites culturels, pillant les nombreux objets de valeur qu’ils renfermaient.

Malgré la défaite de l’EIIS, des éléments du groupe restent présents dans les Plaines de Ninive habitées par les Shabaks et d’autres minorités, qui vivent dans « une situation sécuritaire précaire », a indiqué Jumaa.

De plus, la propagation des factions armées a contribué à la détérioration des conditions de sécurité, car il subsiste des zones de moindre sécurité où les extrémistes pourraient se rassembler, a-t-il indiqué.

Victimes d’une « violence systémique »

L’EIIS reste une menace qui plane sur les sociétés pluriethniques de la région des Plaines de Ninive, a expliqué Anas al-Azzawi, membre de la Haute Commission irakienne des droits de l’homme.

L’EIIS a été chassé de ces régions, mais les éléments restants du groupe continuent d’exploiter les tensions pour pouvoir s’y implanter, a-t-il indiqué à Diyaruna.

Les Shabaks ont fait l’objet de « violences systémiques » de la part de groupes extrémistes qui s’en prennent à tous les groupes ethniques « pour tenter d’anéantir la diversité », a-t-il poursuivi.

« Notre bureau dans la province de Ninive reçoit actuellement des plaintes et des rapports de familles de victimes du terrorisme, notamment de la communauté shabak et d’autres », a expliqué al-Azzawi, ajoutant que son bureau enquête également sur le sort des personnes enlevées disparues.

« Nous nous attachons à collecter des informations et de documents qui condamnent les membres de l'EIIS pour les crimes qu’ils ont commis contre les minorités », a-t-il indiqué.

« Nous avons transmis de nombreux fichiers et des preuves accablantes à l'équipe d’enquêteurs des Nations unies et nous continuerons de travailler avec eux jusqu’à ce que nous parvenions à monter des procès équitables pour ces terroristes », a-t-il conclu.

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