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L'Iran fait appel à ses milices irakiennes pour réprimer les manifestations

Faris al-Omran

Des manifestants iraniens incendient des pneus le 16 novembre lors des manifestations contre une hausse du prix de l'essence. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux] 

Des manifestants iraniens incendient des pneus le 16 novembre lors des manifestations contre une hausse du prix de l'essence. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux] 

Dans le cadre de ses efforts pour réprimer les vastes manifestations populaires dans le pays, le régime iranien a fait venir ses milices affiliées depuis l'Irak voisin.

L'engagement de milices irakiennes dans la répression des manifestations en Iran montre clairement que le régime iranien, par l'intermédiaire du Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) et de ses affiliés, utilisera tous les moyens pour se prémunir contre toute dissidence.

Les manifestations qui ont éclaté à Téhéran le 15 novembre ont eu pour déclencheur une hausse du prix de l'essence et se sont rapidement propagées à 22 provinces iraniennes, soit près de 70 % du pays.

Jeudi 5 décembre, les États-Unis ont déclaré que les autorités iraniennes auraient tué plus de mille personnes depuis le début de ces manifestations.

Des manifestants iraniens participent à une manifestation le 16 novembre à Téhéran contre une hausse du prix de l'essence. [Stringer/AFP]

Des manifestants iraniens participent à une manifestation le 16 novembre à Téhéran contre une hausse du prix de l'essence. [Stringer/AFP]

L'envoyé spécial des États-Unis pour l'Iran Brian Hook a reconnu que ces informations étaient difficilement vérifiables, mais a déclaré que « nous sommes absolument certains qu'il s'agit au moins de plusieurs centaines ».

Plus tôt dans la semaine,Amnesty International avait indiqué que le bilan des morts de ces manifestations était d'au moins 208, mais que le chiffre réel pourrait être bien supérieur.

Le 18 novembre, des milices irakiennes pro-iraniennes ont rejoint la Force de résistance Basij, un groupe paramilitaire affilié au CGRI, pour réprimer les manifestations à al-Jarahi, dans la province méridionale d'Ahwaz.

Douze manifestants ont été tués et quatre autres blessés dans cette région, tandis que trois autres ont été tués dans la ville voisine d'al-Koura.

Recours à une « force brutale »

« Ce régime est violemment secoué, et il a décelé cette menace assez tôt », a expliqué à Diyaruna le spécialiste en stratégie et en sécurité Abdoul Qader al-Nayel.

C'est la raison pour laquelle il fait appel à ses intermédiaires irakiens, a-t-il précisé, pour réprimer les mouvements protestataires de masse qui sont passés des appels à renoncer à l'augmentation du prix de l'essence à des exigences de se débarrasser de la doctrine du Wilayat al-Faqih (la Tutelle du Juriste).

Les milices irakiennes dont la survie est liée au régime iranien, « ont répondu sans hésitation et ont fait leur travail en défendant les leaders du régime et en apportant leur soutien au CGRI par l'usage d'une force brutale pour réprimer les manifestations de la rue iranienne », a-t-il expliqué.

En prenant ces mesures, les milices « ont confirmé sans ambiguïté la brutalité du régime iranien », a ajouté al-Nayel.

Ce régime a en effet permis aux milices irakiennes d'entrer en Iran et de l'aider à réprimer les manifestations, a-t-il poursuivi, ce qui témoigne du peu de respect qu'il a de la vie de son propre peuple.

Le peuple iranien a manifesté contre le régime parce qu'il sait que « ses richesses sont pillées par un petit groupe de personnes au pouvoir », a-t-il ajouté.

Cette élite « vole ses ressources et les utilise pour financer le CGRI et ses intermédiaires étrangers qui s'ingèrent dans les affaires d'autres pays, ce qui n'est pas dans l'intérêt du peuple iranien », a expliqué al-Nayel.

« La plupart des Iraniens vivent dans des conditions difficiles parce qu'ils sont gouvernés par des dirigeants qui ne pensent qu'à leurs intérêts propres », a-t-il poursuivi.

La force excessive exercée par le régime iranien contre son propre peuple montre qu'il n'a « aucune boussole morale », a-t-il continué.

« Il se trouve désormais dans une situation difficile et n'a aucun moyen de contrer la volonté de son peuple à part assassiner et enlever les manifestants et bloquer l'accès à Internet », a ajouté al-Nayel.

Plusieurs « lignes rouges » franchies

Selon Hook, « plusieurs milliers » d'Iraniens ont été blessés lors des manifestations, et au moins 7000 manifestants ont été arrêtés.

Beaucoup ont été « emprisonnés sous des accusations très légères », a expliqué le politologue Ahmed Shawqi à Diyaruna, soulignant que le régime iranien « a franchi de très nombreuses lignes rouges pour réprimer les manifestations ».

Le CGRI a ordonné aux forces Basij de mater les manifestations dans le sud-ouest du pays, notamment à Ahwaz, en collaboration avec les milices irakiennes, a-t-il indiqué.

L'intervention des milices irakiennes montre que celles-ci sont « prêtes à faire ce qu'il faut pour protéger le régime iranien de l'effondrement », a-t-il expliqué, car cela signifierait la fin du soutien qu'elles reçoivent pour opérer en Irak.

Ces milices ont également réprimé violemment les manifestants irakiens qui exigent que soit mis un terme à l'ingérence du CGRI, a-t-il ajouté.

« Aux premiers jours de l'accession au pouvoir du régime iranien, le CGRI avait été créé comme un instrument inefficace, une force parallèle à l'armée iranienne », a-t-il rappelé.

Cette initiative avait été motivée par la défiance du régime iranien envers son propre peuple, a-t-il conclu, soulignant que cela « explique la forte réponse du régime qui a mobilisé ses milices pour résister à la pression populaire en Iran et maintenir son influence à l'étranger ».

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1 COMMENTAIRE (S)
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En tant qu'irakien, je confirme que ces informations sont exactes à 100%. La raison est qu'ils ont pris un de mes proches à l'Iran pour réprimer [les manifestants.]

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