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Pour les militants, la « reconstruction » de la Syrie par le CGRI s'apparente plus à une mainmise

Waleed Abou al-Khair au Caire

Un camion de Jihad al-Bina en Syrie. Le Hezbollah utilise cette fondation comme couverture pour transporter des armes dans la région d'al-Boukamal en prétextant distribuer de l'aide humanitaire, ont expliqué des militants. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Un camion de Jihad al-Bina en Syrie. Le Hezbollah utilise cette fondation comme couverture pour transporter des armes dans la région d'al-Boukamal en prétextant distribuer de l'aide humanitaire, ont expliqué des militants. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Dans sa précipitation pour étendre son emprise physique et son influence en Syrie, le Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) iranien mène les travaux de construction et de reconstruction à la hâte, utilisant des matériaux et des pratiques peu sûrs, expliquent les militants.

La majorité de ces travaux sont supervisés par Jihad al-Bina, une fondation administrée par le Hezbollah et financée par l'Iran, qui possède des succursales dans la région de Damas et dans plusieurs parties de Deir Ezzor.

« Jihad al-Bina se présente dans les médias comme une organisation caritative et de services venue pour soutenir les Syriens », a expliqué à Diyaruna le militant de Damas Mohammed al-Beik.

Mais en réalité, cette fondation liée au CGRI est utilisée pour étendre l'influence et la présence du régime iranien en Syrie et profiter du conflit, a-t-il poursuivi, soulignant que le CGRI cherche également à tirer profit des travaux de reconstruction.

Des camions de Jihad al-Bina dans la campagne de Damas, où les militants affirment que la fondation tente d'accaparer les travaux de reconstruction. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Des camions de Jihad al-Bina dans la campagne de Damas, où les militants affirment que la fondation tente d'accaparer les travaux de reconstruction. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Le fait qu'elle utilise des matériaux de construction non conformes et fasse appel à des pratiques peu sûres fait également courir un danger au peuple syrien, a ajouté al-Beik, précisant que les barres d'armatures en acier et le béton utilisés ne répondent pas aux normes de sécurité en vigueur.

« Il n'y a quasiment aucune supervision du processus de construction », a-t-il ajouté. « Les ingénieurs et les inspecteurs spécialisés affiliés au gouvernement syrien ne jouent aucun rôle, et il leur est strictement interdit d'interférer dans le travail de la fondation.»

Selon les ingénieurs avec lesquels il a pu parler, a rapporté al-Beik, le rythme rapide de la construction a de fortes chances de déboucher sur des structures peu sûres.

Ainsi, lui ont expliqué ces ingénieurs, un bâtiment typique nécessite au moins six mois pour l'excavation et la pose des fondations avant que la construction à proprement parler ne puisse débuter, alors que les bâtisseurs de Jihad al-Bina érigent plusieurs étages en moins de temps.

« Ces constructeurs achètent les barres d'armature provenant des bâtiments effondrés pendant la guerre », a-t-il indiqué, et elles sont ensuite revendues comme des armatures neuves à des prix standards, alors que le coût réel est 25 % inférieur.

« Il agit comme en Iran »

Jihad al-Bina « agit dans plusieurs régions de Deir Ezzor et d'al-Boukamane comme s'il était en territoire iranien », a expliqué à Diyaruna Jamil al-Abed, militant à Deir Ezzor.

La fondation et ses affiliés ont pris le contrôle de plusieurs villes et villages, a-t-il indiqué, et ont « totalement interdit aux civils d'y revenir à moins qu'ils n'acceptent de travailler comme membres des milices du CGRI dans la région ».

Certaines villes dans lesquelles Jihad al-Bina a conduit les travaux de reconstruction ont été transformées en « quartier général des milices du CGRI et en logements pour les éléments de diverses nationalités, notamment des Iraniens, des Irakiens, des Libanais et des Afghans », a-t-il poursuivi.

Par le biais de ces mesures, le CGRI cherche à « resserrer son emprise sur la région, en particulier dans les zones proches de la frontière avec l'Irak, afin de sécuriser les routes et les carrefours » et introduire des changements démographiques, a ajouté al-Abed.

Les affiliés du CGRI ont également « empêché la distribution de l'aide alimentaire aux civils de ces régions et ont limité cette distribution aux seules institutions qui lui sont affiliées », a-t-il ajouté.

Caché derrière Jihad al-Bina

« La plupart des responsables de Jihad al-Bina sont des membres du Hezbollah libanais choisis pour travailler sous cette couverture, afin de permettre [au Hezbollah] de se déplacer librement sous une couverture non militaire pour transporter des armes, des munitions et des roquettes du Liban et d'Irak en Syrie », a expliqué l'avocat syrien Bashir al-Bassam.

Le CGRI utilise le Hezbollah en raison de sa grande expérience de ce type de travail au Liban, a-t-il expliqué à Diyaruna, où Jihad al-Bina sert également de façade, permettant au Hezbollah de se déplacer librement et de se déployer militairement dans plusieurs régions.

« Le contrôle par le Hezbollah de la direction de cette fondation lui permet de transporter des armes en toute liberté sous couvert d'aide humanitaire, et de mener des campagnes de recrutement dans la zone », a ajouté al-Bassam.

Des jeunes sont recrutés comme combattants sous le couvert de la fondation, a-t-il indiqué en conclusion, qui les incite à la rejoindre en exploitant leurs difficultés financières, puis les envoie combattre dans les rangs des milices affiliées au CGRI.

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