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Terrorisme

Des militants d'Idlib mettent en garde contre une nouvelle alliance extrémiste

Waleed Abou al-Khair au Caire

Des éléments de Tahrir al-Sham installent une mitrailleuse dans la campagne de la province d'Idlib. Prise sous le feu de tous les côtés, l'alliance extrémiste tente d'élargir sa coalition. [Photo fournie par Moussab Assaf]

Des éléments de Tahrir al-Sham installent une mitrailleuse dans la campagne de la province d'Idlib. Prise sous le feu de tous les côtés, l'alliance extrémiste tente d'élargir sa coalition. [Photo fournie par Moussab Assaf]

La crainte monte parmi la population civile dans les provinces syriennes d'Idlib, de Hama et d'Alep que les groupes extrémistes présents dans la région ne tentent de former une nouvelle alliance, ont expliqué à Diyaruna des militants et des experts syriens.

Les inquiétudes à propos d'une nouvelle alliance dirigée par Tahrir al-Sham, les derniers éléments de « l'État islamique en Irak et en Syrie » (EIIS) et al-Qaïda secouent la région, en dépit de la trêve récemment déclarée et de la mise en place d'une zone démilitarisée.

Cela fait maintenant des mois que Tahrir al-Sham s'entretient avec tous les groupes extrémistes dans les régions d'Idlib, de Hama, d'Alep et de Latakia dans le but de former une nouvelle coalition dans l'attente d'une nouvelle attaque, a expliqué Moussab Assaf, un militant d'Idlib, à Diyaruna.

« Ces tentatives de Tahrir al-Sham ont été largement couronnées de succès », a-t-il indiqué, « et cela a fait naître des craintes parmi les civils sur la possibilité de voir la région être le théâtre d'une campagne violente et brutale visant à éradiquer ces groupes ».

Des combattants de Tahrir al-Sham mènent un raid dans la province syrienne d'Idlib. [Photo fournie par Moussab Assaf]

Des combattants de Tahrir al-Sham mènent un raid dans la province syrienne d'Idlib. [Photo fournie par Moussab Assaf]

Des combattants de Jaish al-Azza, un groupe affilié à Hurras al-Din qui contrôle les confins de la province de Latakia. [Photo fournie par Moussab Assaf]

Des combattants de Jaish al-Azza, un groupe affilié à Hurras al-Din qui contrôle les confins de la province de Latakia. [Photo fournie par Moussab Assaf]

La population civile de la région redoute également les luttes intestines occasionnelles qui surgissent entre ces factions et les combats entre Tahrir al-Sham et des factions de l'Armée syrienne libre (ASL) alliées sous la bannière du Front syrien de libération, a poursuivi Assaf.

« Simple question de temps »

« Les civils de la région d'Idlib sont certains que c'est une simple question de temps avant que ne débutent les opérations militaires dans la région, et qu'à ce stade elles sont inévitables », a ajouté Assaf, dans la mesure où Idlib est devenu une destination pour les groupes extrémistes.

En réponse à cette menace grandissante, les civils prennent des mesures de précaution, comme l'aménagement de sous-sols pour servir d'abris, et le déblaiement et l'élargissement de grottes naturelles pour faire office d'abris dans l'éventualité de frappes aériennes, a-t-il indiqué.

Au vu de la forte concentration de la population dans la région d'Idlib, qui compte au moins trois millions d'habitants et des milliers de déplacés internes (DI), a-t-il poursuivi, les conséquences d'un assaut de grande ampleur seraient catastrophiques.

La population déplacée vit dans des camps disséminés, dans des conditions très difficiles, qui empireraient encore si la trêve qui a été déclarée venait à être rompue, a précisé Assaf.

Les craintes des civils sont encore renforcées par l'échec de Tahrir al-Sham et d'autres groupes extrémistes à respecter les conditions de cette trêve, a-t-il encore ajouté.

Concernant la mise en place d'une zone démilitarisée, aucun des groupes extrémistes n'a retiré ses armes lourdes de la zone, comme cela avait été convenu, mais ils ont au contraire renforcé leurs positions avec des fortifications et des armes.

Ils ont creusé de nombreux tunnels qui relient les positions entre elles, a-t-il expliqué, soulignant que certaines sources indiquent que Tahrir al-Sham contraint ses prisonniers à les creuser.

Alliances avec les extrémistes

« Tahrir al-Sham a pu former des alliances avec les groupes radicaux les plus importants », a expliqué le journaliste syrien Mohammed al-Abdoullah à Diyaruna.

La plupart de ces groupes souscrivent à l'idéologie d'al-Qaïda et continuent d'honorer leur serment d'allégeance au leader d'al-Qaïda Ayman al-Zawahiri, a-t-il continué.

Ces groupes avaient auparavant refusé de rejoindre Tahrir al-Sham parce que le groupe avait révoqué son allégeance à al-Zawahiri, a-t-il souligné.

Parmi eux se trouvent Hurras al-Din, l'EIIS, Ansar al-Tawhid, le Parti islamique du Turkestan en Syrie, Jaish al-Azza et Liwa Suqour al-Ghab, a-t-il continué, en plus de Liwa al-Aqsa, Ansar al-Din, Jaish al-Sahel, Jund al-Malahem et des dizaines de combattants issus du groupe Jund al-Aqsa récemment dissout.

Hurras al-Din compte la plus forte concentration de combattants extrémistes et étrangers, suivi par le Parti islamique du Turkestan en Syrie, a-t-il ajouté.

« Tahrir al-Sham a redoublé d'efforts pour attirer des combattants étrangers et a relativement bien réussi à le faire », a précisé al-Abdoullah, notamment auprès des groupes asiatiques et européens.

À l'exception notable de quelques opposants auxquels Tahrir al-Sham s'est pris avec force, comme cela a été le cas avec un groupe d'extrémistes français qui se font appeler « les étrangers ».

Empêtrés dans des conflits doctrinaires

Tahrir al-Sham a généralement permis à ces groupes de combattants étrangers de conserver leur indépendance et d'exercer leur contrôle sur leurs zones, a indiqué al-Abdoullah.

Ils se concentrent dans la campagne du nord de Hama et du nord-est de Latakia, ainsi que dans certaines localités d'Idlib, notamment Kafr Takharim, Sarmada, Harem, Sarmin, Saraqeb, Jabal al-Zawiya, Salqin et Jisr al-Shughour, a-t-il précisé.

Certains éléments extrémistes ont rejeté l'idée d'une alliance avec Tahrir al-Sham en raison de différends doctrinaires, qui ont conduit à de fréquentes explosions de violence.

Tahrir al-Sham tente de s'imposer face à ces groupes extrémistes en affirmant qu'il n'accepte pas la trêve et qu'il est prêt à combattre les forces du régime et ses milices alliées, a poursuivi al-Abdoullah.

Il a également tenté de s'imposer face aux extrémistes en ajoutant la chahada au drapeau de la révolution syrienne, pour essayer d'unir toutes les factions présentes dans la région qu'il contrôle, a indiqué al-Abdoullah.

À Idlib en particulier, Tahrir al-Sham permet aux factions présentes dans la province d'imposer des tributs et des taxes et de s'engager dans des transactions commerciales et des opérations de contrebande pour se financer, a-t-il précisé.

« La seule zone qui leur reste »

Il est normal que les groupes extrémistes cherchent à former une alliance dans la région d'Idlib, car c'est la seule région qui leur reste, a expliqué le major général Wael Abdoul Mouttalib, spécialiste militaire et ancien officier dans l'armée égyptienne.

Cela est vrai non seulement de la Syrie, mais de la région tout entière, a-t-il déclaré à Diyaruna, car ils ne peuvent se rendre en Irak comme ils le faisaient jadis, ni même dans d'autres parties de la Syrie, car ils sont encerclés.

La formation d'une alliance est désormais une question de vie ou de mort pour les groupes extrémistes, assiégés à la fois par le régime syrien et ses milices affiliées et par les Forces démocratiques syriennes (FDS) appuyées par la coalition internationale.

En persuadant les derniers extrémistes de former une alliance, Tahrir al-Sham tente de se présenter comme la force dominante sur le terrain, a précisé Abdoul Muttalib.

Et il tente de le faire alors même que de nombreuses factions sont opposées à ses objectifs, a-t-il poursuivi.

La bataille pour Idlib, si elle devait avoir lieu, sera « la plus violente de toutes les batailles » qui ont eu lieu en Syrie, a averti Abdoul Mouttalib.

Elle aura de multiples répercussions négatives, a-t-il conclu, en particulier pour les civils, qui paieront le prix de l'intransigeance des extrémistes.

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