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Sécurité

L'alliance naissante entre la Russie et l'Iran attise les tensions sectaires dans le monde musulman

La rédaction du Salaam Times

Le président russe Vladimir Poutine et le président iranien Hassan Rouhani se sont réunis à Téhéran avec leurs représentants en novembre 2017 pour parler de la poursuite de la coopération entre leurs deux nations sur la Syrie, le Yémen et l'Afghanistan. [Kremlin]

Le président russe Vladimir Poutine et le président iranien Hassan Rouhani se sont réunis à Téhéran avec leurs représentants en novembre 2017 pour parler de la poursuite de la coopération entre leurs deux nations sur la Syrie, le Yémen et l'Afghanistan. [Kremlin]

Les liens de plus en plus proches entre Moscou et Téhéran exacerbent les fractures sectaires dans le monde musulman et révèlent l'objectif du Kremlin, qui est de gagner de l'influence en s'alignant sur les activités déstabilisatrices de l'Iran.

Le régime du président russe Vladimir Poutine tente depuis des années de redevenir important au Moyen-Orient, en Afghanistan, en Asie centrale et au-delà, suite à la chute de l'Union soviétique et à l'isolation internationale de la Fédération de Russie que cela a entraînée.

Les événements récents montrent que le Kremlin a décidé de se joindre à l'Iran. De l'Afghanistan à la Syrie, et du Yémen à l'Irak, le soutien russe accordé au programme diviseur et expansionniste de Téhéran est évident.

Cette relation naissante a cependant eu des conséquences dévastatrices pour les habitants de ces régions.

Une délégation militaire iranienne dirigée par le ministre de la Défense Amir Hatami rencontre des officiers militaires russes dirigés par Valery Gerasimov, chef d'Etat-major des forces armées, le 15 avril à Moscou. [Ministère iranien de la Défense]

Une délégation militaire iranienne dirigée par le ministre de la Défense Amir Hatami rencontre des officiers militaires russes dirigés par Valery Gerasimov, chef d'Etat-major des forces armées, le 15 avril à Moscou. [Ministère iranien de la Défense]

Des membres de la division afghane Fatemiyoun, appuyée par le CGRI, grimpent une colline dans cette nouvelle photo de Syrie, où ils combattent avec l'aide militaire de la Russie, en soutien au président syrien Bachar el-Assad et aux intérêts sectaires de l'Iran. [Archive]

Des membres de la division afghane Fatemiyoun, appuyée par le CGRI, grimpent une colline dans cette nouvelle photo de Syrie, où ils combattent avec l'aide militaire de la Russie, en soutien au président syrien Bachar el-Assad et aux intérêts sectaires de l'Iran. [Archive]

Des troupes et des avions russes à leur base à Khmeimim depuis laquelle ils ont appuyé des milices soutenues par l'Iran dans leur lutte pour aider le président syrien Bachar el-Assad. [Ministère russe de la Défense]

Des troupes et des avions russes à leur base à Khmeimim depuis laquelle ils ont appuyé des milices soutenues par l'Iran dans leur lutte pour aider le président syrien Bachar el-Assad. [Ministère russe de la Défense]

La Russie a utilisé son veto plus d'une dizaine de fois au cours des dernières années au Conseil de sécurité de l'ONU pour protéger l'Iran et ses alliés, parmi lesquels la Syrie et les Houthis au Yémen. Cette photo montre l'ambassadeur russe à l'ONU Vassily Nebenzia. [Mission permanente de la Fédération russe à l'ONU]

La Russie a utilisé son veto plus d'une dizaine de fois au cours des dernières années au Conseil de sécurité de l'ONU pour protéger l'Iran et ses alliés, parmi lesquels la Syrie et les Houthis au Yémen. Cette photo montre l'ambassadeur russe à l'ONU Vassily Nebenzia. [Mission permanente de la Fédération russe à l'ONU]

Grâce à la puissance militaire russe et son siège permanent au Conseil de sécurité de l'ONU, la Russie et l'Iran ont forgé une alliance qui a coûté des milliers de vies, a provoqué le déplacement de millions de personnes et a exacerbé les tensions sectaires dans des régions déjà fragiles et explosives.

Soutien au « croissant chiite »

Le récent partenariat entre la Russie et l'Iran a principalement commencé avec l'objectif commun de soutenir le régime du président syrien Bachar el-Assad qui, avec son père Hafiz avant lui, entretient depuis longtemps des liens avec Téhéran et son Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI).

L'Iran voit la Syrie comme un élément clef pour cimenter son influence sectaire dans le prétendu « croissant chiite », un ensemble de pays possédant une majorité chiite ou une forte minorité chiite de l'Iran au Liban.

La Syrie sert surtout de conduit terrestre permettant aux armes et à l'influence iraniennes d'arriver jusqu'au Liban, où Téhéran soutient le groupe activiste politique du Hezbollah contre l'ennemi historique de Téhéran, Israël.

De son côté, la Russie apprécie depuis longtemps la Syrie comme acheteur de son matériel militaire, et garde jalousement l'accès à son seul port méditerranéen, dans la ville syrienne de Tartous.

Avec le déclenchement de la guerre civile en Syrie, Moscou a vu l'opportunité de brandir aveuglément ses capacités de projection militaire, et pour démontrer son influence dans une région comportant une forte présence des Etats-Unis.

L'intérêt commun au maintien de la survie du régime d'al-Assad a conduit la Russie et l'Iran à envoyer des armes, des combattants et de l'argent pour renforcer l'armée syrienne après près de huit ans de guerre.

Rien qu'en Syrie, ce soutien a provoqué la mort de près de 500 000 Syriens, et le déplacement de millions de personnes. La plupart de ces morts et déplacements ont touché la majorité sunnite – ceux qui s'opposent aux plans sectaires d'al-Assad et de l'Iran.

Depuis, l'alliance entre la Russie et l'Iran s'est élargie pour servir le discours et les objectifs sectaires de l'Iran.

La Russie étant de plus en plus isolée sur la scène internationale, à cause de son ingérence dans les élections à l'étranger, les invasions de pays voisins et son soutien à des régimes autoritaires, elle s'est mise à chercher des alliés également en difficulté sur le plan international, dans ce cas l'Iran.

La Russie et l'Iran utilisent depuis longtemps la couverture de « l'antiterrorisme » pour masquer leurs objectifs sectaires et expansionnistes.

Ces deux pays comparent souvent l'opposition syrienne, des citoyens se battant pour leur liberté face à un dictateur qui gaze son propre peuple, à « l'Etat islamique en Irak et en Syrie » (EIIS) et d'autres groupes extrémistes.

La Russie et l'Iran semblent s'appuyer plus que jamais sur leur faux discours antiterroriste et leur alliance.

La Russie utilise le veto à l'ONU pour protéger les plans de l'Iran

En plus de la coopération militaire et des renseignements, la Russie a utilisé plusieurs fois son veto pour bloquer des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU critiquant l'Iran et les Etats alliés à l'Iran.

En plus de la dizaine de veto que la Russie a utilisés pour protéger le régime syrien, y compris le 10 avril lorsqu'elle a bloqué une résolution condamnant l'utilisation d'armes chimiques contre des civils par le régime, le Kremlin a protégé l'Iran contre une punition pour son rôle dans la guerre au Yémen.

Le 26 février, la Russie a fait échouer une résolution du Conseil de sécurité qui aurait fait pression sur l'Iran pour l'utilisation illégale de missiles fabriqués en Iran par des insurgés houthis chiites au Yémen.

Cette résolution, que le conseil de quinze membres aurait sans cela acceptée facilement, était destinée à renouveler un embargo sur les armes arrivant à expiration et concernant les Houthis, appuyés par Téhéran, ainsi que le mandat d'un groupe d'experts ayant déterminé que l'Iran l'avait enfreint.

Au lieu de cela, le Conseil de sécurité a été contraint d'adopter une résolution rédigée par la Russie renouvelant l'embargo sur les armes et le mandat, mais évitant toute mention d'armes d'origine iranienne au Yémen.

« Double jeu » en Afghanistan

La Russie s'est également associée à l'Iran en Afghanistan où, ironiquement, ils utilisent un groupe extrémiste sunnite pour accomplir leur besogne.

De nombreuses preuves confirment que les deux pays fournissent des armes, de l'argent et de l'entraînement aux combattants talibans, qui sont déterminés à renverser le gouvernement de Kaboul soutenu par l'Occident.

La Russie et les médias russes attisent les tensions sectaires et ethniques pour tenter de déstabiliser le gouvernement afghan et répandre de fausses informations dans le pays.

Après des années de démenti, l'ambassadeur iranien en Afghanistan, Mohammadreza Bahrami, a admis en décembre 2016 que l'Iran a des liens avec les talibans.

Cet aveu prouve le double jeu de l'Iran : il envoie de l'argent, des armes et des soldats en Syrie et en Irak en clamant combattre « le terrorisme wahhabite », mais en aidant dans le même temps les talibans, un mouvement auquel il est en théorie opposé, en Afghanistan.

En 2007 déjà, des responsables afghans remarquaient que des convois transportant des armes destinés aux talibans franchissaient la frontière de l'Afghanistan à l'Iran, selon les médias.

Plus récemment, des combattants talibans ont de plus en plus été observés utilisant des armes fabriquées en Russie ou en Iran.

Bien que la Russie prétend soutenir l'insurrection talibane en Afghanistan pour lutter contre l'EIIS, des responsables afghans déclarent que le Kremlin menace la sécurité et les efforts antiterroristes afghans.

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