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L'Europe réfléchit au sort des familles des extrémistes qui souhaitent rentrer

AFP

Le président français François Hollande fait un discours lors de sa visite sur le porte-avions français Charles de Gaulle le 4 décembre 2015 au large des côtes syriennes. Hollande a pris la parole trois semaines après avoir déclaré la « guerre » à « l'État islamique » après les attentats de Paris, qui avaient fait 130 morts. [Philippe de Poulpiquet/POOL/AFP]

Le président français François Hollande fait un discours lors de sa visite sur le porte-avions français Charles de Gaulle le 4 décembre 2015 au large des côtes syriennes. Hollande a pris la parole trois semaines après avoir déclaré la « guerre » à « l'État islamique » après les attentats de Paris, qui avaient fait 130 morts. [Philippe de Poulpiquet/POOL/AFP]

Alors que s'effondre le califat autoproclamé de « l'État islamique » (Daech), les gouvernements européens doivent affronter un problème commun : que faire des combattants et de leurs familles qui reviennent?

Les gouvernements n'ont pas caché leurs réticences à laisser revenir leurs ressortissants partis combattre en Irak et en Syrie mais qui, maintenant que l'heure de la défaite approche, souhaitent rentrer dans leurs pays respectifs.

La perspective de récupérer les extrémistes pose des questions de sécurité évidentes sur un continent qui, ces dernières années, a souffert d'une vague d'attentats terroristes.

Mais cette situation présente également des dilemmes d'ordre éthique – notamment sur le point de savoir s'il faut abandonner les femmes et les enfants européens des extrémistes à leur sort.

Des membres de la coalition internationale contre « l'État islamique » se rassemblent lors d'une conférence à Koweït le 15 mars pour discuter de la coordination pour endiguer le flot de combattants étrangers arrivant en Irak et en Syrie. [Yasser al-Zayyat/AFP]

Des membres de la coalition internationale contre « l'État islamique » se rassemblent lors d'une conférence à Koweït le 15 mars pour discuter de la coordination pour endiguer le flot de combattants étrangers arrivant en Irak et en Syrie. [Yasser al-Zayyat/AFP]

« Madame la chancelière, je veux rentrer au pays avec ma famille, aidez-nous », a imploré Nadja Ramadan, une femme de 31 ans originaire de Francfort, dans une vidéo adressée à la chancelière allemande Angela Merkel.

« Je ne suis pas une terroriste », insiste-t-elle dans cette vidéo publiée par le journal Die Zeit, un bébé dans les bras.

Ramadan et ses trois enfants étaient retenus dans l'ancien bastion de Daech à al-Raqqa, qui a été repris le mois dernier par les Forces démocratiques syriennes (FDS). À ce jour, Berlin s'est refusé à l'aider.

Elle fait partie d'un nombre croissant d'Européens qui déposent des demandes d'aide auprès de leurs gouvernements – par le biais des médias ou par le truchement de leurs familles.

La semaine dernière, une vingtaine de familles ont écrit au président français Emmanuel Macron, lui demandant de ramener leurs filles au pays pour qu'elles s'expliquent devant les tribunaux.

« Il est difficile d'accepter le fait que nos filles, qui n'ont pas combattu, puissent être traitées de la même manière » que leurs maris, ont-elles écrit.

Elles demandent instamment à « la France, le pays des droits de l'homme », de ne pas laisser ces femmes encourir un risque de torture ou de mort en Syrie ou en Irak.

« la seule manière de les traiter est de les abattre ».

Sur les quelque 5 000 extrémistes européens que l'on pense être partis combattre, près d'un tiers sont déjà rentrés, selon le centre Soufan, une organisation non gouvernementale qui effectue des recherches sur la sécurité mondiale.

Certains restent engagés dans l'extrémisme violent, a-t-il mis en garde, ajoutant qu'il est « clair que quiconque souhaite continuer à se battre trouvera un moyen de le faire ».

À ce jour, la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne ont traité le problème des rapatriés au cas par cas.

En Grande-Bretagne, où sont rentrées quelque 425 personnes, l'objectif est de « les traduire devant les tribunaux afin qu'ils aillent en prison pour longtemps », a expliqué Mark Rowley, policier responsable de l'antiterrorisme.

Pour ceux qui ne peuvent être placés en détention, a-t-il ajouté, les autorités doivent se fier à la surveillance et à d'autres « mesures de prévention » pour assurer la sécurité du pays.

Mais certains en Grande-Bretagne sont ouvertement partisans d'une ligne plus dure.

Rory Stewart, ministre d'État adjoint au Développement international et ministre d'État aux Affaires étrangères et au Commonwealth, a déclaré la semaine dernière qu'il n'y avait qu'une seule manière de neutraliser les combattants britanniques de Daech.

« Ces personnes représentent pour nous un sérieux danger », a-t-il déclaré à la radio BBC. « Malheureusement, la seule manière de les traiter, dans presque tous les cas, est de les abattre ».

Le ministre de la Défense Michael Fallon a également déclaré que les Britanniques qui combattent dans les rangs de Daech étaient des « cibles légitimes ».

La menace des enfants

Raphaello Pantucci, directeur des études de sécurité internationales du groupe de réflexion britannique RUSI, a estimé que les gouvernements « ne se sont pas précipités » pour revendiquer la responsabilité des nationaux capturés par les FDS à al-Raqqa et ailleurs.

Bien que dans la plupart des cas ces combattants et leurs femmes terminent par choix dans la zone de guerre, « nous avons un devoir de suivi envers nos concitoyens », a-t-il affirmé.

« S'ils se dévoilent et si nous pouvons les soumettre à un procédé régulier, nous devrions le faire. »

Il est difficile de blâmer les enfants des extrémistes européens pour les décisions et les croyances de leurs parents, a-t-il ajouté.

Mais au moins en Allemagne, même les plus jeunes sont considérés comme une menace pour la sécurité.

« Nous considérons le retour en Allemagne des enfants des djihadistes, endoctrinés dans une zone de guerre, comme quelque chose de dangereux », a mis en garde le mois dernier le directeur des services du renseignement allemand Hans-Georg Massen. « Cela pourrait permettre à une nouvelle génération de djihadistes d'être élevée ici. »

En France, qui a vu revenir près de 300 ressortissants sur 1 700, les autorités ont adopté une position ferme face aux demandes des familles de sauver leurs proches détenus dans les territoires repris à Daech.

La ministre de la Défense Florence Parly a déclaré mardi que les ressortissants français détenus en Irak pouvaient y être jugés.

En Syrie, a-t-elle ajouté, les ressortissants français détenus par différents groupes ont été signalés au Comité international de la Croix-Rouge.

Ceux qui ont réussi à rentrer devront répondre de leurs actes, a-t-elle déclaré.

« Les personnes qui rentrent en France doivent savoir qu'elles s'exposent à des poursuites légales systématiques. »

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