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Droits de l'Homme

L'Irak enregistre les enfants nés dans les régions contrôlées par l'EIIS

Khalid al-Taie

Un responsable de la sécurité surveille la délivrance de documents à une famille de la province de Ninive, le 18 février. [Photo fournie par le ministère irakien de l'Intérieur]

Un responsable de la sécurité surveille la délivrance de documents à une famille de la province de Ninive, le 18 février. [Photo fournie par le ministère irakien de l'Intérieur]

Les autorités irakiennes ont commencé le 1er juin à enregistrer les enfants nés dans les régions qui étaient auparavant sous le contrôle de « l'État islamique en Irak et en Syrie » (EIIS).

Les tribunaux irakiens travaillent en partenariat avec les responsables de la sécurité pour délivrer des certificats de naissance à des enfants non enregistrés sur la base des documents d'identité de leurs parents ou de déclarations de témoins.

Cette mesure mettra un terme à l'une des questions les plus épineuses de l'ère de l'EIIS, qui avait laissé des milliers d'enfants sans enregistrement officiel, car les documents émis par le groupe ne sont pas reconnus par le gouvernement irakien.

L'initiative visant à enregistrer ces enfants est « une initiative importante », car il serait injuste de les priver de leur droit à la citoyenneté dans leur propre pays de naissance, a expliqué Ali al-Bayati, porte-parole de la Haute Commission indépendante irakienne des droits de l'homme.

Des femmes font la queue avec leurs enfants pour déposer leurs demandes de papiers officiels dans la province de Ninive, le 25 juin 2017. [Photo fournie par le ministère irakien de l'Intérieur]

Des femmes font la queue avec leurs enfants pour déposer leurs demandes de papiers officiels dans la province de Ninive, le 25 juin 2017. [Photo fournie par le ministère irakien de l'Intérieur]

« Obtenir ces documents signifie qu'ils pourront bénéficier de tous leurs droits de citoyens et pourront être intégrés dans la société afin que leur avenir soit protégé », a-t-il poursuivi pour Diyaruna.

Auparavant, ces familles se trouvaient confrontées à de nombreuses barrières lorsqu'elles déposaient une demande d'inscription de leurs enfants, a-t-il ajouté, car les couples irakiens qui s'étaient mariés alors que l'EIIS contrôlait leur région devaient d'abord prouver la validité de leur mariage.

« La question devenait même encore plus complexe si l'un des parents, en particulier le père, était mort, était porté disparu ou avait été lié au groupe terroriste », a précisé al-Bayati.

Il a été demandé aux autorités chargées de la sécurité de mener des enquêtes approfondies, a-t-il poursuivi, notamment dans les cas où le père était un combattant étranger de l'EIIS marié à une Irakienne.

« Nous espérons qu'après cette décision, la question sera prise plus au sérieux en dépit des difficultés et de sa complexité, et que cela pourra dans certains cas aboutir à une solution positive », a-t-il ajouté.

Al-Bayati a également appelé à l'adoption d'une législation sur la question des enfants d'origine inconnue et ceux dont la filiation ne peut être déterminée avec certitude, et demandé à ce que les familles d'enfants orphelins soient indemnisées.

Il a souligné l'importance de la justice transitoire dans les communautés libérées « afin que les droits de toutes les familles et des enfants nés sous le règne des terroristes, en particulier des enfants de combattants de l'EIIS, soient protégés ».

Résolution humanitaire

« Cette décision apaise les craintes de voir naître une nouvelle génération de terroristes ou de criminels », a expliqué Ghazwan al-Dawoodi, membre du conseil provincial de Ninive.

Ces derniers mois, le conseil a reçu « de nombreuses demandes émanant de familles, en particulier de femmes d'activistes de l'EIIS, lui demandant d'intervenir et d'enregistrer rapidement leurs enfants », a-t-il raconté à Diyaruna.

« Nous avons également appelé à plusieurs reprises à la résolution de cette question, et demandé qu'elle fasse l'objet d'un traitement humanitaire », a-t-il précisé, soulignant que les enfants nés de parents de l'EIIS ne devraient pas être tenus pour responsables des crimes de leurs parents.

Ces enfants « ne doivent pas être laissés sans papiers, ce qui les exposerait à de la délinquance, des violences, des actes de vengeance et des sentiments de marginalisation et de discrimination », a poursuivi al-Dawoodi.

Il a suggéré de résoudre ce dossier complexe par étapes.

« Nous devons dans un premier temps résoudre la question des enfants dont les parents sont toujours vivants, puis des orphelins et de ceux dont la filiation est inconnue », a-t-il précisé.

La décision d'enregistrer les enfants nés dans des zones qui étaient contrôlées par l'EIIS « soulève une question humanitaire épineuse », a expliqué Ayser Fakhri, professeur de psychologie à l'université de Bagdad.

Ce point s'applique en particulier aux « enfants nés dans des circonstances extraordinaires et qui sont aujourd'hui âgés de 2 à 5 ans », a-t-il indiqué à Diyaruna.

Cette décision renforce les chances que ces enfants deviennent des personnes bien adaptées et intégrées dans la société irakienne, a indiqué Fakhri, soulignant que cela exige aussi que soient assurés des services de soutien et une réinsertion psychologique.

Cette initiative du gouvernement « coupera l'herbe sous le pied des terroristes qui profitent de ces enfants » en leur lavant le cerveau avec une idéologie extrémiste et en les recrutant, a-t-il conclu.

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