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L'Iran siphonne les devises fortes d'Irak pour tenter de contourner les sanctions

Hassan al-Obaidi à Bagdad

Des hommes à la bourse de Bagdad. [Hassan al-Obeidi/Diyaruna]

Des hommes à la bourse de Bagdad. [Hassan al-Obeidi/Diyaruna]

L'Iran déploie de grands efforts pour siphonner des devises fortes en Irak pour tenter de contourner les sanctions américaines, bloquant ce faisant les mesures prises par la Banque centrale d'Irak pour stimuler le dinar, ont expliqué des experts irakiens à Diyaruna.

Les données quotidiennes du marché aux enchères des devises de la Banque centrale d'Irak (BCI) montrent qu'entre 140 millions et 163 millions de dollars sont injectés chaque jour sur le marché intérieur depuis le début de 2018, selon le site web officiel de la banque.

Cela fait partie du plan affiché par la banque pour maintenir la bonne santé du dinar irakien et empêcher une baisse de sa valeur, avec 34 sociétés et banques qui disposent de licences préalables d'achat de devises fortes.

Malgré cela, le cours du dinar irakien ne s'est pas amélioré ces derniers mois.

Vêtements et marchandises sur le marché du quartier d'al-Karrada de Bagdad. [Hassan al-Obeidi/Diyaruna] 

Vêtements et marchandises sur le marché du quartier d'al-Karrada de Bagdad. [Hassan al-Obeidi/Diyaruna] 

« Les Iraniens sont directement responsables de cette confusion sur le marché, de cette instabilité du dinar irakien et de cette hémorragie de dollars américains », a expliqué le directeur général d'une société de change et de transfert d'argent de Bagdad agréée par la BCI, qui a demandé à rester anonyme.

« Ils mettent en œuvre plusieurs moyens pour ponctionner des dollars sur le marché chaque jour », a-t-il ajouté pour Diyaruna.

Au lieu de rester en circulation sur le marché irakien, « la devise forte disparaît et est transférée en Iran » par plusieurs canaux, a-t-il poursuivi.

Dans certains cas, des gangs achètent de grandes quantités de dollars auprès de sociétés, a-t-il ajouté.

Dans d'autres, des entreprises métallurgiques, des cimenteries, des entreprises de pièces automobiles, d'appareils électriques et alimentaires iraniennes « offrent des remises de 20 à 25 % si le paiement est effectué en dollars américains », a-t-il expliqué.

Pour bénéficier de ces remises, les Irakiens échangent leurs dinars contre des dollars pour faire leurs achats, a-t-il ajouté.

« À leur tour, ces sociétés utilisent des moyens détournés pour contourner la BCI et transférer chaque jour de grandes quantités de devises fortes vers Téhéran », a-t-il ajouté.

Corruption aux postes-frontière

Selon le directeur général, certains responsables de la sécurité et inspecteurs aux postes-frontière sont « impliqués dans ces activités criminelles ».

Ces transactions font du tort aux citoyens irakiens, dont la situation générale serait meilleure si la valeur du dinar irakien était plus favorable.

Le député irakien Majida al-Tamimi, membre de la commission des finances au parlement, avait averti en 2017 que l'Irak était vidé de ses devises fortes « par le truchement de fausses transactions d'importation ».

Plus récemment, le député irakien de Diyala Humam al-Tamimi a pointé le 15 janvier des soupçons de corruption et de trafic à l'un des deux postes-frontière de Diyala avec l'Iran.

Il a demandé au gouvernement irakien de lutter contre la corruption aux frontières.

« Le gouvernement doit lancer une vaste campagne pour la surveillance des frontières », a déclaré la députée irakienne Alia Nassif à Diyaruna, ajouter qu'il devait se concentrer sur les points de passage où des soupçons répétés de contrebande avaient été enregistrés.

« Il ne fait aucun doute que certaines des personnes travaillant à ces postes-frontière sont impliquées, et nous devons lutter contre [les responsables] corrompus avec la même intensité que nous luttons contre les terroristes », a-t-elle poursuivi.

Lors d'une conférence de presse du 12 février à Bagdad, le chef de l'Autorité des postes-frontière Kazim al-Aqabi avait souligné la question de la corruption aux postes-frontière du pays.

« Il est indéniable qu'il existe des cas de corruption au sein de l'Autorité des postes-frontières, comme dans n'importe quelle autre agence gouvernementale », avait-il affirmé.

Cela a entraîné l'Irak aux dernières places de l'Indice de perception de la corruption de Transparency International, avait-il ajouté, précisant que l'autorité mettait en place des mesures pour lutter contre la corruption.

La contrebande fait du tort à l'économie irakienne

Des biens et des marchandises de toutes sortes entrent en permanence en fraude en Irak par la frontière avec l'Iran, « et des devises fortes passent d'Irak en Iran », a ajouté Adel Ali, de la Chambre de commerce de Bagdad.

« Certaines milices parrainent ces activités, à la fois de contrebande en Irak et de sape du marché en en retirant les devises fortes », a-t-il expliqué à Diyaruna.

Les Iraniens purgent l'Irak de ses richesses, entravant ainsi la reprise d'activité des industries irakiennes et les empêchant de parvenir à l'autosuffisance en devant compter sur les importations en provenance d'Iran, a expliqué pour sa part Athil al-Nujaifi, président de la coalition Qarar irakienne.

Hama Amin, membre du Parti démocratique kurde, a expliqué que cette contrebande avait épuisé les économies des villes de la région kurde, ainsi que d'autres provinces irakiennes.

« Les Iraniens ouvrent la frontière de leur côté à quiconque souhaite faire entrer des marchandises en contrebande en Irak, parce qu'ils savent que [ces contrebandiers] ramèneront des dollars avec eux », a-t-il indiqué à Diyaruna.

La BCI doit mettre en place de nouvelles solutions, autres que la mise aux enchères des devises fortes, dans le but d'empêcher une perte de valeur du dinar irakien, a-t-il poursuivi.

La BCI a suspendu toutes les transactions en dollars par les banques et les sociétés de versements depuis l'étranger par suite des sanctions imposées à l'Iran.

« En vertu de la décision de la direction de la Banque centrale d'Irak, la conduite de transactions en dollars avec des filiales de banques iraniennes est interdite », a précisé un communiqué de la banque.

En novembre dernier, la BCI avait également annoncé qu'elle suspendait la vente de dollars américains par les banques nationales aux ressortissants irakiens qui envisageaient de voyager en Iran.

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1 COMMENTAIRE (S)
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C'est un article menteur et sectaire. Ce n'est pas vrai

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