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L'ombre d'al-Qaïda plane toujours sur la province syrienne d'Idlib, selon les analystes

AFP

Des combattants de Tahrir al-Sham tirent des missiles à partir d'un village proche d'al-Tamanah lors des combats contre le régime syrien dans la province d'Idlib, le 11 janvier 2018. [Omar Haj Kadour/AFP]

Des combattants de Tahrir al-Sham tirent des missiles à partir d'un village proche d'al-Tamanah lors des combats contre le régime syrien dans la province d'Idlib, le 11 janvier 2018. [Omar Haj Kadour/AFP]

Le groupe extrémiste qui contrôle désormais la province d'Idlib dans le nord-ouest de la Syrie affirme avoir rompu les liens avec al-Qaïda, mais les analystes expliquent que malgré plusieurs changements de noms, rien ne permet de penser qu'il a changé.

Tahrir al-Sham a scellé son emprise sur Idlib la semaine dernière après avoir signé un cessez-le-feu avec ce qu'il restait des factions rivales dans la région.

Au fil du temps, l'alliance extrémiste a changé à la fois de nom et de leaders, et des déclarations publiées sur l'internet suggèrent qu'elle a coupé les liens avec al-Qaïda, le groupe terroriste fondé par Oussama ben Laden.

Mais de nombreux experts affirment que ces déclarations ne sont qu'une illusion, expliquant que Tahrir al-Sham tente simplement de semer le doute et de tromper les agences de renseignement.

Le Front al-Nosra (FAN), la faction de l'opposition qui a donné naissance à Tahrir al-Sham, avait annoncé en juillet 2016 avoir rompu avec al-Qaïda.

Mais cela a juste consisté à « changer de nom tout en conservant un serment secret d'allégeance », a expliqué Hassan Hassan, spécialiste des mouvements extrémistes à l'Institut Tahrir de politique moyen-orientale.

« À travers ses nombreuses itérations, Tahrir al-Sham n'a pas changé son idéologie et l'on estime qu'il conserve encore en grande partie des liens avec al-Qaïda », a indiqué ce think tank de Soufan lundi 14 janvier.

« Tahrir al-Sham a conservé ses liens avec les loyalistes d'al-Qaïda dans le nord de la Syrie, attribuant même des zones et des ressources à ses rivaux supposés », a poursuivi Hassan.

Plusieurs groupes extrémistes présents dans Idlib prêtent encore officiellement allégeance à al-Qaïda, dirigé par Ayman al-Zawahiri, d'origine égyptienne, depuis la mort de ben Laden.

Parmi eux se trouve Hurras al-Deen, une faction de quelques milliers d'extrémistes, dont des Syriens et d'anciens combattants étrangers des guerres en Afghanistan et en Irak.

Ce groupe comprend également des membres du Parti islamique du Turkestan, un groupe extrémiste dominé par des combattants ouïghours, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme.

Hurras al-Deen a combattu aux côtés de Tahrir al-Sham lorsque ce dernier a pris le contrôle d'Idlib contre d'autres groupes d'opposition appuyés par la Turquie.

Une séparation « montée de toutes pièces »

Tahrir al-Sham revendique plus de 25 000 combattants, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme.

Selon Jean-Pierre Filiu, professeur à Sciences Po à Paris, « al-Qaïda reste une organisation centralisée, disposant d'une forte chaîne de commandement hiérarchisée ».

« Plusieurs indications suggèrent que Tahrir al-Sham n'a fait que monter de toutes pièces sa 'rupture' avec al-Qaïda », a ajouté Filiu.

Le Front al-Nosra peut avoir cherché à prendre ses distances avec al-Qaïda, car une association placerait ses combattants dans la ligne de mire des frappes aériennes de la coalition, a-t-il expliqué.

« Bien que Tahrir al-Sham affirme être une entité indépendante non affiliée à al-Qaïda, l'organisation a grandi à partir de l'affilié syrien d'al-Qaïda, le Front al-Nosra, à la suite d'une série de changements de noms stratégiques », a indiqué Soufan.

« Durant ses nombreuses itérations, Tahrir al-Sham n'a pas changé son idéologie et l'on estime qu'il conserve encore en grande partie des liens avec al-Qaïda », a expliqué ce groupe de recherche et de conseil.

Tahrir al-Sham a étendu sa mainmise administrative sur Idlib avec son soi-disant « gouvernement de salut », après avoir pendant des années cultivé ses liens fondamentaux avec les habitants locaux.

Lundi, la Coalition nationale syrienne, le principal groupe d'opposition en exil, a qualifié Tahrir al-Sham « d'organisation terroriste », une désignation utilisée par l'ambassade des États-Unis à Damas depuis mai 2017.

« Le cœur de Tahrir al-Sham est le Front al-Nosra, une organisation terroriste désignée. Cette désignation s'applique quel que soit le nom utilisé ou quels que soient les groupes qu'elle englobe », a ajouté l'ambassade dans un message sur les réseaux sociaux.

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