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Terrorisme

L'Irak prend en charge les enfants affectés par la violence de l'EIIS

Par Khalid al-Taie

Les enfants qui ont perdu leurs parents à cause de la violence de « l'État islamique en Irak et en Syrie » sont ramenés chez eux en bus depuis les camps de déplacés. [Photo fournie par le ministère irakien des Migrations et des Déplacements]

Les enfants qui ont perdu leurs parents à cause de la violence de « l'État islamique en Irak et en Syrie » sont ramenés chez eux en bus depuis les camps de déplacés. [Photo fournie par le ministère irakien des Migrations et des Déplacements]

Le gouvernement irakien s'efforce d'atténuer les effets psychologiques de la violence de « l'État islamique en Irak et en Syrie » (EIIS) chez les enfants qui ont perdu leurs parents par la faute du groupe ou qui ont été témoins de ses atrocités, ont expliqué les autorités à Diyaruna.

« La violence a eu un impact négatif sur de nombreux enfants dans les villes les plus touchées par le terrorisme », a expliqué à Diyaruna Abeer Jalabi, directrice de l'Autorité de protection des femmes et des enfants au ministère.

Le ministère du Travail et des Affaires sociales apporte actuellement un service d'accompagnement psychologique à 80 enfants âgés de 5 à 16 ans dans les camps qui relèvent de son administration, a-t-elle poursuivi.

Certains appartiennent à la minorité yézidie, mais l'identité de nombreux autres reste inconnue, car les forces irakiennes les ont extraits durant leur progression vers Mossoul.

Des enfants yézidis reçoivent des cadeaux de la part d'organisations caritatives dans un camp de réfugiés en Irak, sur cette photo publiée en juin 2015. [Photo fournie par l'Association Shingal pour l'aide aux orphelins]

Des enfants yézidis reçoivent des cadeaux de la part d'organisations caritatives dans un camp de réfugiés en Irak, sur cette photo publiée en juin 2015. [Photo fournie par l'Association Shingal pour l'aide aux orphelins]

« Par le biais d'un programme de suivi psychologique, nous essayons d'aider les enfants qui ont été les plus affectés », a-t-elle expliqué.

Des images douloureuses

Certains enfants n'ont pas répondu à ce soutien psychologique, même après plusieurs mois de réhabilitation, a-t-elle indiqué, soulignant qu'ils ne « manifestent aucun désir d'appartenir au groupe et préfèrent rester seuls plutôt que de se mélanger aux autres ».

« Il nous incombe de faire plus pour les aider, parce que les épreuves que ces enfants ont dû traverser n'ont pas été faciles », a-t-elle ajouté.

Certains de ces enfants ont assisté au meurtre de leurs parents par l'EIIS, a-t-elle poursuivi.

« Ces images douloureuses ne peuvent être effacées de leurs esprits, ce qui provoque chez eux des accès de dépression et d'angoisse », a-t-elle expliqué, ajoutant qu'elles ont « laissé une empreinte indélébile dans leurs esprits et sur la manière dont ils perçoivent le monde ».

Le ministère recevra prochainement jusqu'à 1 000 enfants orphelins qui ont besoin d'un suivi, a-t-elle poursuivi, dont les mères avaient épousé des combattants de l'EIIS et ont été détenues pour être interrogés.

« Nous nous efforçons de pouvoir les accueillir et de pouvoir réhabiliter ce grand nombre d'enfants », a expliqué Jalabi, précisant que le ministère avait demandé le soutien du gouvernement et d'organisations de la société civile.

« Nous avons besoin de beaucoup de moyens, de programmes et d'un personnel hautement spécialisé pour traiter un large éventail de cas liés à la violence, et nous devons élargir nos services pour être en mesure de traiter encore plus d'enfants », a-t-elle ajouté.

Angoisses chroniques

« La barbarie de l'EIIS a affecté certains enfants encore plus que d'autres », a expliqué Nouha Darwish, enseignante en psychologie à l'université de Bagdad.

Les actions du groupe ont déclenché des angoisses chroniques chez les enfants qui ont vécu dans les zones de conflit, ainsi que tout un ensemble de maladies psychologiques, a-t-elle expliqué à Diyaruna.

Ces enfants vont grandir avec un sens déformé de la réalité, et pourraient constituer une menace pour la société s'ils ne sont pas aidés, a ajouté Darwish.

Le suivi d'un stress post-traumatique nécessite un plan de grande ampleur intégré dans les efforts de reconstruction dans les zones libérées, a-t-elle poursuivi, notant que la création d'une société saine est aussi importante que les efforts de reconstruction.

Vivre une enfance normale est d'une importance capitale pour élever une génération saine et mûre, a expliqué Israa al-Obaidi, militant de Mossoul qui travaille pour l'Organisation unie des droits de l'homme, une organisation non gouvernementale (ONG).

« Le gouvernement et les organisations doivent travailler ensemble pour traiter l'impact du terrorisme sur les enfants », a-t-elle affirmé à Diyaruna.

« Cela n'est pas facile et demande de nombreux efforts et des années de suivi et de traitement, durant lesquelles les enfants concernés suivent une réhabilitation psychologique assurée par des spécialistes », a-t-elle expliqué.

Les enfants d'un viol constituent un défi

Un autre défi pour le gouvernement et la société irakienne concerne le sort des enfants nés d'un viol ou d'un mariage forcé à un membre de l'EIIS.

« Ces enfants sont pris en charge, sans aucune discrimination, dans des orphelinats ou des camps de réfugiés » en Irak, a expliqué Layla al-Barzanji, députée irakienne et militante des droits de l'homme de la province de Ninive, qui travaille étroitement avec ces enfants.

« Ils manquent d'affection maternelle, parce que leurs mères les ont abandonnés, soit volontairement, soit en raison de pressions sociales », a-t-elle indiqué à Diyaruna.

Al-Barzanji a ainsi raconté l'histoire d'une femme yézidie contrainte d'abandonner son bébé, né d'un combattant de l'EIIS, et de le confier à un orphelinat parce qu'elle ne pouvait l'élever dans sa communauté locale où « il n'aurait pas été accepté », a expliqué cette femme.

Il n'existe toujours pas de données officielles sur le nombre d'enfants âgés de moins de quatre ans nés d'un viol ou d'un mariage forcé à un extrémiste, car tous ne vivent pas dans des orphelinats.

Les forces de libération ont également pris en charge des enfants dont les deux parents étaient affiliés à l'EIIS, et d'autres dont l'identité reste inconnue.

Tous ces enfants vivent sans papiers d'identité officiels, a poursuivi al-Barzanji, ce qui ne leur permet pas de bénéficier de leurs pleins droits en tant que citoyens et donc les aliènent vis-à-vis du reste de la société.

Cela aura une incidence importante sur leur éducation et leur avenir, a-t-elle ajouté.

Al-Barzanji a vivement souhaité que s'instaure une collaboration entre le gouvernement et les organisations de la société civile pour mettre en place un programme complet à long terme en vue de la réhabilitation psychologique des victimes de viol et pour mieux sensibiliser la société à leur infortune.

Ce programme devrait également s'attacher à faciliter les procédures d'adoption de jeunes orphelins, pour rendre la procédure moins complexe, a-t-elle conclu.

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