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Réfugiés

Les réfugiés du camp d'al-Rukban luttent pour survivre

Par Waleed Abou al-Khair au Caire

Le camp d'al-Rukban, dans le no man's land qui s'étend le long de la frontière jordano-syrienne, a été la cible de plusieurs attaques de « l'État islamique ». [Photo fournie par Tareq al-Nuaimi]

Le camp d'al-Rukban, dans le no man's land qui s'étend le long de la frontière jordano-syrienne, a été la cible de plusieurs attaques de « l'État islamique ». [Photo fournie par Tareq al-Nuaimi]

La mort quotidienne d'enfants atteints de malnutrition ou de maladies est désormais « habituelle » pour les déplacés syriens qui vivent dans le camp d'al-Rukban, dans le no man's land qui s'étend entre la Jordanie et la Syrie, expliquent des responsables à Diyaruna.

Ce camp a été la cible d'attaques régulières de « l'État islamique » (Daech), à la suite desquelles toutes les organisations humanitaires y ont suspendu leurs opérations.

La situation dans le camp est « catastrophique dans tous les domaines », a expliqué Mohammed Ahmed Derbas, vice-président du conseil tribal de Palmyre et membre du conseil d'administration du bureau humanitaire dans le camp d'al-Rukban.

Les seuls soins médicaux disponibles dans le camp sont assurés par une clinique située près de la frontière, « qui est destinée uniquement à traiter les blessures mineures et les cas d'urgence », a-t-il précisé à Diyaruna.

« Sinon, les soins médicaux à l'intérieur du camp sont totalement inexistants, en particulier les soins pour les enfants, les personnes âgées et celles souffrant de maladies chroniques », a-t-il ajouté.

Les cas critiques sont transférés en Jordanie pour y être traités, a-t-il poursuivi, mais leur transport est difficile et ne se limite qu'à un faible nombre de cas.

Difficulté d'accès

Le camp d'al-Rukban a été mis en place en 2015 pour recevoir les civils syriens qui fuyaient les régions de Palmyre, al-Qaryatayn, al-Raqqa et Deir Ezzor contrôlées par Daech.

Au départ, des tentes avaient été dressées de manière aléatoire dans la zone tampon entre la Jordanie et la Syrie, mais la zone est rapidement devenue un camp permanent pour les populations déplacées, notamment les membres des tribus locales.

Ce camp abrite maintenant près de 100 000 déplacés internes (DI), a expliqué à Diyaruna Tareq al-Nuaimi, travailleur humanitaire à al-Rukban.

L'an dernier, après qu'un kamikaze de Daech eut tué sept soldats jordaniens dans une base militaire éloignée de moins d'un kilomètre et demi du camp, la Jordanie avait déclaré que les lieux étaient une « zone militaire fermée » et avait arrêté d'accepter que des réfugiés franchissent sa frontière.

« Le camp est installé dans une zone désertique très difficile, et les réfugiés sont en permanence frappés par des tempêtes de sable et les montées très rapides des eaux qui se produisent parfois », a-t-il indiqué.

En avril, les inondations et les vents ont arraché des dizaines de tentes et laissé de nombreuses familles sans abri, a poursuivi al-Nuaimi.

De plus, ce camp est isolé, sans route pour le relier à d'autres régions, rendant difficile la fourniture de nourriture et d'eau potable à ses habitants.

Manque de nourriture et de vaccins

Les autorités jordaniennes fournissent au camp 600 mètres cubes d'eau potable tirés de puits et transportés par des camions-citernes, a expliqué al-Nuaimi, ajoutant que cette quantité n'est pas suffisante « vu que la population du camp augmente régulièrement ».

La nourriture qui parvient à al-Rukban vient de groupes opérant dans les zones libérées de Syrie et arrive « en quantités négligeables », a expliqué Derbas, soulignant que le manque de nourriture a un impact direct sur les enfants.

Plusieurs nourrissons meurent chaque jour par suite du manque d'eau et de nourriture, a-t-il poursuivi, et le manque de vaccins rend les enfants vulnérables à toutes sortes de maladies.

Le conseil tribal de Palmyre est responsable de la sécurité dans le camp, a indiqué Derbas, et a mis en place un service de police de près d'une centaine de jeunes volontaires, qui règlent les litiges survenant entre habitants du camp.

Ils ont également pour mission de détecter toute tentative de la part de Daech de s'infiltrer dans le camp en se mélangeant aux réfugiés qui arrivent, a-t-il précisé.

« Ce service de police coordonne ses actions avec les factions de l'Armée syrienne libre (ASL) présentes dans la région pour intervenir en cas d'urgence », a-t-il déclaré. « Ces factions de l'ASL assurent une protection extérieure complète contre toute attaque par les terroristes. »

« Pas d'autre alternative »

En dépit de la situation à al-Rukban, de nombreuses familles continuent d'arriver chaque jour dans le camp en provenance de Deir Ezzor et d'al-Raqqa pour échapper aux combats qui se sont intensifiés dans ces régions.

Les civils qui fuient « n'ont pas d'autre alternative », a déclaré à Diyaruna Bassem al-Aqaidat, 40 ans, résident de ce camp.

« La situation très difficile rend tout le monde très nerveux et entraîne des conflits qui se transforment parfois en échanges de coups de feu », a-t-il raconté.

La nourriture, l'eau et les fournitures médicales sont inaccessibles, « sauf pour ceux qui ont de l'argent », a-t-il ajouté, soulignant que la situation sécuritaire dans le camp était très préoccupante en l'absence de forces de sécurité régulières pour y maintenir l'ordre.

Quant à l'éducation, certaines tentatives bénévoles ont souhaité mettre en place des écoles de fortune dans de grandes tentes, a expliqué al-Aqaidat. Mais le manque de fournitures, de programmes, de manuels et d'autres produits nécessaires en a fait de simples espaces de jeu.

« L'une des situations catastrophiques dans ces camps est le rejet des déchets dans des espaces ouverts et les égouts à l'air libre », a-t-il ajouté, ce qui a entraîné une invasion de rongeurs et d'insectes qui se multiplient l'été avec les fortes chaleurs, et la propagation de maladies.

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