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Terrorisme

Daech ment aux civils sur leur « havre de paix »

Par Waleed Abou al-Khair au Caire

Des civils ayant fui « l'État islamique » se réfugient dans la partie rurale d'al-Raqqa. Le groupe empêche les habitants d'al-Raqqa de fuir, pendant que les Forces démocratiques syriennes avancent sur la ville. [Photo fournie par les Forces démocratiques syriennes]

Des civils ayant fui « l'État islamique » se réfugient dans la partie rurale d'al-Raqqa. Le groupe empêche les habitants d'al-Raqqa de fuir, pendant que les Forces démocratiques syriennes avancent sur la ville. [Photo fournie par les Forces démocratiques syriennes]

Par le biais de sa machine médiatique, « l'État islamique » (Daech) a cherché à présenter son prétendu califat comme un endroit où vivre sûr et attrayant.

Mais cette vision idéalisée est très éloignée de la vérité, indiquent à Diyaruna les habitants des zones contrôlées par Daech et des observateurs, car le groupe a interdit aux civils de partir.

Alors que les forces de libération sur le terrain, appuyées par les forces aériennes de la coalition, progressent dans les zones contrôlées par Daech, le groupe garde les habitants à proximité pour pouvoir les utiliser comme boucliers humains lorsque c'est nécessaire.

« Depuis la création du soi-disant État du groupe, sa machine médiatique l'a constamment présenté comme un havre de paix pour les civils », a rapporté le journaliste syrien Mohammed al-Abdoullah à Diyaruna.

Daech a utilisé la promesse d'emplois, de logements et d'un style de vie purement islamique pour attirer des combattants et des civils dans son État, a-t-il raconté, alors même qu'il empêche les habitants de ces zones qui n'adhèrent pas à cette idéologie de fuir.

Le groupe cherche maintenant à utiliser les civils comme boucliers humains dans ces régions « pour prolonger la guerre, afin de forcer la coalition internationale à engager des forces au sol et de mener une longue guerre d'usure », a expliqué al-Abdoullah.

Daech a bouclé les zones sous son contrôle et a interdit aux civils de partir, et ses combattants se sont répartis dans les maisons privées d'al-Raqqa, mettant en danger la vie des civils lors des frappes aériennes, a-t-il ajouté.

Cette tactique est également conçue pour dissuader les forces terrestres comme les Forces démocratiques syriennes (FDS) d'attaquer les bastions urbains du groupe, a-t-il précisé.

« Selon certains rapports d'al-Tabqa, le groupe a contraint des habitants des faubourgs de la ville à rester dans leurs maisons alors que les FDS approchent », a-t-il rapporté.

Les combattants de Daech se sont ensuite déployés dans les zones résidentielles pour ralentir les combats, a-t-il indiqué, car les soldats des FDS « ont essayé d'éviter que les civils soient pris dans les affrontements ».

Persuader les habitants de rester

Daech a fait circuler l'idée que « al-Raqqa est un havre de paix pour les habitants de la ville, et qu'ils y sont protégés de ce qui se produirait s'ils partaient », a fait savoir Wael Moustafa, un habitant d'al-Raqqa qui a demandé à témoigner sous couvert d'anonymat par crainte pour sa sécurité.

Pour cela, a-t-il raconté à Diyaruna, le groupe a fait courir des dizaines de fausses informations accusant les FDS, une alliance arabo-kurde, de mauvais traitements et d'exécutions contre des Arabes.

Daech a aussi prétendu que les FDS voulaient confisquer les biens et les maisons des habitants, a-t-il ajouté, espérant ainsi les pousser à rester en ville en les effrayant.

« Le groupe a deux objectifs en faisant circuler ces rumeurs », a-t-il déclaré. « Le premier est d'empêcher la population locale de coopérer avec les FDS, et le second est de mettre fin à la fuite des habitants. »

La fuite des civils de la ville a laissé certaines zones complètement vides, a rapporté Moustafa, ajoutant que « le groupe est fermement opposé à cela, car l'un de ses objectifs principaux est de transformer les civils en boucliers humains ».

S'enfuir de la ville d'al-Raqqa est presque impossible à l'heure actuelle « parce que le groupe a grandement renforcé son contrôle sur les habitants et a mis en place des postes de contrôle aux abords de la ville et dans les zones surplombant les champs », a-t-il indiqué.

Le nombre de passeurs prêts à aider les habitants à quitter la ville en traversant les champs de mines de Daech a diminué, a-t-il déclaré, ajoutant que « ceux qui restent font payer des prix exorbitants qui sont loin d'être dans les moyens des habitants restants ».

Le coût du passage d'une famille de quatre personnes pour quitter la ville est de 3 000 $, a-t-il fait savoir.

Protection des vies civiles

« Les FDS et toutes les factions agissant sous le commandement de l'opération Colère de l'Euphrate ont pour priorité la sécurité des civils présents dans les régions contrôlées par Daech », a affirmé à Diyaruna le commandant de peloton des FDS Ghassan Ibrahim.

Les assauts visant Daech et mettant potentiellement en danger des civils sont reportés, a-t-il indiqué, expliquant que des équipes des forces spéciales contactaient les habitants des zones qu'elles abordent pour coordonner le processus d'évacuation vers des lieux sûrs.

« Des dizaines d'évacuations ont ainsi eu lieu au cours des quatre phases de la campagne Colère de l'Euphrate », a déclaré Ibrahim.

Mais les soldats des FDS sont confrontés à des difficultés pour les évacuations, a-t-il poursuivi, car Daech dissémine ses tireurs d'élite pour tuer tous ceux qui tentent de s'enfuir, et a posé des milliers de mines et d'engins explosifs improvisés (EEI)

« La présence d'enfants et de personnes âgées ralentit aussi considérablement le processus d'évacuation », a-t-il fait savoir, ajoutant que « l'évacuation de civils des zones rurales d'al-Raqqa est plus facile que celle des habitants de la ville ».

Il est plus facile d'aller dans des villages et des fermes pour en évacuer les occupants, a-t-il expliqué, car les éléments de Daech n'y sont pas présents en grand nombre « et les zones en question sont vastes et difficiles à surveiller et à contrôler entièrement ».

Dans la ville d'al-Raqqa, a-t-il précisé, le groupe a commencé il y a plusieurs mois à renforcer son emprise sur les postes de contrôle, pour empêcher les civils de s'enfuir.

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